La crise de la culture / La tradition et l’âge moderne - Hannah Arendt




Je vais partager avec vous dans les jours à venir des extraits du premier ouvrage que j’ai loué à la « bibliothèque » (si on peut nommer ainsi une pièce minuscule où l’on entasse des livres sans aucun souci d’ordre ne serait-ce qu’alphabétique) de la clinique qui me rééduque : La crise de la culture par Hannah Arendt (1906-1975). Il s’agit en fait d’articles revus et augmentés que cette penseuse à publiés dans diverses revues américaines. Je publierai un article pour chacun de ces essais.Je n’en livre que de (relativement) courts passages, de ceux qui m’ont vraiment frappée, mais en vrai il faudrait tout lire, ce à quoi je t’enjoins très très fort, lecteurice. Par exemple, pour le premier chapitre sur la tradition et l’âge moderne, ici il ne sera question que de Marx et d’Aristote mais tu te doutes qu’il va falloir réviser ton Platon, ton Socrate et même tout ton alphabet grec (et ton latin tant que tu y es) si tu te lances dans le chapitre entier. Je me suis concentrée sur mes petites marottes, là où je trouvais des réponses à mes questionnements personnels : la violence, la liberté, l’autorité, la vérité notamment.

I. La tradition et l’âge moderne 

C’est assez lumineux pour me dispenser d’avoir à commenter et surtout trop immensément respectable pour que je puisse me le permettre, à moins que je ne doive ajouter quelque contexte pour en guider la lecture. Cela dit, il y a eu une ou deux fois où je n’ai pas été d’accord avec elle et si j’arrive à oser, je le ferai savoir.

Bonnes lectures.

I. La tradition et l’âge moderne

L’attitude de Marx à l’égard de la tradition de pensée politique fut de rébellion consciente. Dans un esprit de défi et de paradoxe, il conçut donc certaines thèses clefs qui, contenant sa philosophie politique, fondent et excèdent la partie strictement scientifique de son œuvre […]. Décisives parmi elles sont les suivantes : « Le travail a créé l’homme » (dans une formulation d’Engels qui, contrairement à une opinion courante parmi certains spécialistes de Marx, traduisit habituellement la pensée de Marx avec justesse et concision). « La violence est la sage-femme de toute vieille société grosse d’une nouvelle. » d’où : la violence est la sage-femme de l’histoire.

[…]

La violence est traditionnellement l’ultima ratio dans les rapports entre nations et la plus honteuse des actions domestiques puisqu’on la considère toujours comme le signe caractéristique de la tyrannie (les quelques tentatives pour sauver la violence, principalement celles de Machiavel et de Hobbes, sont d’une grande pertinence quant au problème du pouvoir et tout à fait révélatrices de la confusion précoce du pouvoir avec la violence mais elles exercèrent une influence extrêmement faible sur la tradition de pensée politique antérieure à notre époque.) Pour Marx, au contraire, la violence, ou plutôt la possession des moyens de violence est l’élément constitutif de toutes les formes de gouvernement ; l’État est l’instrument de la classe dirigeante au moyen duquel elle opprime et exploite, et tout le domaine de l’action politique est caractérisé par l’emploi de la violence.

[…]

La double définition aristotélicienne de l’homme comme ζῶον πολιτιϰὁν et ζῶον λόγον ἔχον, un être accomplissant sa vocation la plus éminente dans la faculté de la parole et dans la vie de la polis, était destinée à distinguer le Grec du barbare et l’homme libre de l’esclave. La distinction était que les Grecs, vivant ensemble dans une polis, conduisaient leurs affaires au moyen de la parole, par persuasion (πείθειν), et non au moyen de la violence, par contrainte muette. […] Les Barbares étaient régis par la violence et les esclaves contraints au travail.


Question pernicieuse du coup : si tu te bases sur ces lapidaires définitions (et en admettant que j’ai droit d’additionner celles d’Aristote à celle de Marx) (alors qu'Hannah les oppose justement, hein, anciens vs âge moderne) et en observant de ce dont ta vie est faite quotidiennement, tu es quoi ?

Plutôt grec·que ou plutôt barbare ?

Plutôt aristotélique (tu nies la violence de ta société pour la rejeter sur celle des autres) ou plutôt marxiste (tu la voies et éventuellement tu l'assumes) ? Dirigeant·e (tu possèdes les moyens de la violence), esclave (tu es obligé·e de travailler) ou homme / femme libre (tu n’es pas obligé·e de travailler et tu es un·e citoyen·ne lambda) ?


Commentaires

  1. Clairement grec plutôt que barbare, pour le reste, je ne sais pas trop quoi répondre.
    Je dirais que la violence est inhérente à l'humain et que la culture devrait y faire obstacle, mais je ne suis pas sûr de répondre à ta question.

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