Sororisation générale - Chloé Delaume




L’expérience commence… C’est Chloé Delaume au micro de France Culture pour le Week-end Imagine au Centre Pompidou, qui nous livre un texte inspiré de son ouvrage Mes bien chères sœurs et performé aux côté de la musicienne Sophie Couronne et la comédienne Elisa Monteil. Tu vas comprendre ce que sororité veut dire. Attention, pépite.

Ça va envoyer du bois : tu vas apprendre des mots (comme sestralité ou uxoricide), des concepts et recevoir quelques conseils pour mettre en actes tous ces mots. Qui veut jouer à BADABOUM avec moi ?




Le patriarcat bande mou. D’avoir giclé partout depuis l’invention de Moïse, sa prostate se nécrose. Des siècles d’hégémonie, la boue faite de nos sœurs, le saint-doux de père en fils, prédation affichée, paternalisme sournois, domination acquise. Le pouvoir pour alcaloïde et l’assurance des ogres qui reçoivent, attablés. Sélection naturelle et concurrence vitale. Quelque chose est pourrie au royaume de la flaque. Les indices et symptômes croissent et se multiplient. À se contempler jouir de son impunité, le mâle alpha n’a pas vu surgir l’obsolescence de ses propres attributs et fonctions symboliques.

Vigueur, combativité, courage, maîtrise, les canons occidentaux antiques sont en cours de fossilisation. Le mâle alpha s’éteint, ses pouvoirs s’amenuisent. L’époque est historique et les faits indéniables. Les critères et fictions virilistes se périment à mesure que la technologie se substitue à l’humain. Force et puissance physique : les muscle de ces messieurs, l’automation s’en branle. Drones et exosquelettes partout se greffent et se déploient.

Les formes et stratégies d’oppressions séculaires s’avèrent déjà inefficaces. Intimider un algorithme ne relève pas plus de l’envisageable que de culpabiliser une base de données. Les logiciels sont insensibles au chantage affectif, l’intelligence artificielle hermétique aux effets de la testostérone. Au contact de la quatrième révolution industrielle, la phallocratie devient soluble. Tous égaux devant le chômage et les applications de rencontres. Des corps usés, nervures dissoutes, de la viande au rabais qui à force de râteaux s’est tellement attendrie, c’est dur de distinguer l’identité sexuelle de la chair à pâté, quel que soit le marché sur lequel elle échoue.

Le couillidé ne contrôle plus rien mise à part la taille de sa barbe. Les jeunes filles codent et les enfants rient de la fable du chevalier. Évolution des mœurs et des pratiques de vie. Sur les écrans trop de héros. Dans la réalité, « protéger » est un verbe qui ne se conjugue plus qu’à l’échec antérieur. Le mythe du papa-tronc, pilier sécuritaire, se consume à même la souche. En sachant le roi nu, plus personne ne se veut prince. Un sceptre, une dynastie. Faillite pour héritage et anosognosie, des châteaux en hospices, vue sur le bilan carbone, la corruption transmise de gourdin en gourdin. Les trésors de papi, la jeunesse le remercie mais elle n’a pas de placard dans sa colocation.

C’est l’histoire d’une espèce qui se regarde dans le miroir sans admettre que son visage est celui de Donald Trump, ni que le monothéisme lui fait une vilaine peau. C’est l’histoire de la chute du vieux papatronat, à l’heure où la puissance ne sait plus dans quel corps elle devrait s’incarner. C’est l’histoire du pouvoir qui soudain change de camp.

Au commencement était la Toile, le couillidé pris dans ses fils, sélection sous twitelle et concurrence virale, bouleversements et crises, environnements pluriels, numérique et virtuel. Maintenant dans l’open-space, tout le monde entend crier.

Abois, effondrement, certains y voient une traque, déplorent que désormais au bureau niveau ambiance, avec ces hystériques on peut plus faire une vanne. C’est pas la fête du slip. Certainement, c’est une traque. Spécimen prédateur, autre main, autre trique, dans les bureaux des femmes en même temps que l’alarme un cor sonne l’hallali.

Depuis que s’est craquelé le lac d’indifférence, par un trou dans la glace les cadavres de stagiaires refluent à la surface. Une odeur de sirènes en décomposition, bacchanales faisandées de promesses frelatées, les narcisses repêchés empestent la naïveté et les larmes croupies. C’est une vraie infection.

Équité absolue, précarité partout et privilèges nulle part. Face à la fin d’un monde le sexe importe peu et tout fait mauvais genre. Transition observable, pas besoin d’être sybille pour lire dans les entrailles des selfies retouchés.

C’est l’histoire d’une espèce qui s’est crue le génie d’un miroir qui se fissure, conjonction de mouvements et séismes multiples qui actuellement convergent. Mœurs et économie, société et outils, informations, savoirs, accessibilité, circulation, paroles, gestes et changements d’urgence sur planète agonique.

Binaire ou gender-fluid, transition vers la mort, à chacun de gérer. Un queer vaut mieux que deux choléras admettra grand-papa en regrettant que le cloud ne puisse pas l’héberger. Individualité partout, patriarcat nulle part. L’exil est impossible et l’abuseur cerné. Abrogation concrète, dégraissage des usages. Désolé, ça sent le fauve, il est temps d’aérer.

C’est l’histoire d’une espèce qui ne sait pas s’adapter, déplacement des enjeux autant que des espaces intimes, privés, publics ; mutation des tissus sociaux, transformation de la cellule familiale ; famille par toutes, famille pour toutes ; des papas, des mamans, une activité de groupe, structures et liens s’inventent, adaptés, inédits. Les noyaux se fissurent, les places se redéfinissent, comme les identités. L’hétéro-normatif lui aussi se dissout au contact du réel, le propre du vivant c’est de créer la surprise…

La chaîne de reproduction prône son autonomie. Les ventres femelles rappellent : qu’importe la poule ou l’œuf, l’important dans l’histoire c’est qu’on se passe de coquelets. Les spermatozoïdes nécessaires mais discrets. Transmutation des mœurs et techniques génétiques, PMA, GPA…

Du haut de la pyramide alimentaire, le couillidé perd ses dents et cela le chagrine, il y tenait beaucoup. En mémoire des souvenirs des incisives, en mémoire des parquets que nous eûmes tant rayés, les organes se recyclent et le sperme se congèle, les dents, des organes durs, implantées dans les os. Avant de disparaitre, peut-être que chaque espèce fait un dernier cauchemar ? Avant de disparaitre peut-être que chaque espèce se demande pourquoi elle maintenant et pas plus tard ?

Les poses masculinistes scintillent dans le formol et les taxidermistes s’impatientent chez Deyrolle. Le mâle dominant découvre qu’autour de lui les femmes le trouvent moins attractif que n’importe quel gay. L’intime est politique et les enfants du queer s’amusent à touiller le trouble dans les chakras béants. Alchimie barbotante, invocations sorcières, les sorts sont mis à jour, passés au micro-onde puis plongés dans l’eau froide, ajoutez du bromure et une pincée de mots-dièses, les consciences en direct se mettront à bouillir. Le gras remonte à la surface, sa traçabilité étrangement translucide.

Des billes de vif-argent, des chenilles de mercure tordent leurs cheveux verts, le thermomètre se brise dans un éclat de rire. Du vibro ou de la bite, ce que maman préfère, il suffit de demander. Tout l’or des coups de reins devient le chant d’un batelier au creux des tables de nuit, le tiroir aux petites morts. Autonomisation de l’orgasme à l’échelle nationale. Le marché des sex-toys poursuit son explosion tan dis que celui des piles alcalines progresse depuis dix ans sans que le quotidien n’ait été envahi de nouvelles télécommandes ou d’appareils hi-fi sans prise, câbles, connexions… L’intime est politique, le clitoris en 3D et le tri sélectif.

L’environnement se meut. L’aube, cette fois c’est certain, dévorent les crépuscules. Mœurs et techniques de vie, les réseaux se déploient, extensions persistantes pour un changement de climat et des gueules d’atmosphère. La lutte des arcs-en-ciel, les combats remportés, le mariage des licornes, révolution des cœurs et du nombre de battements aux marches des mairies ; étoffes, triangles roses, palpitantes, mémorielles, rehaussées de sequins, le code civil à la main ou à la boutonnière. La lutte des arcs-en-ciel. Il en reste des anges. Tant de siècles et tant d’âmes broyées de ne pas répondre aux normes universelles de sécurité mentale hétéro-planifiée. Avant d’être sur un char, festoyant la gay-pride au milieu de ses ami·es, c’était dans l’ambulance, direction un endroit où on va te soigner que, sanglées de cuir, les licornes ruaient dans les brancards. L’homosexualité déclassifiée en France comme maladie mentale : juin 1981. Jusque-là pas le sauna mais le sanatorium. Jusque-là quand une mère enfantait une licorne, elle avait des problèmes avec sa belle-famille. Le mariage des licornes : le couillidé s’étrangle, du vent sur le parvis. Le sang des anges, des grains de riz, le parcours, la trachée… Tonton, pourquoi tu tousses ? Pourquoi papa s’étouffe ? Où est passé Charlie ? Parfois, lorsqu’un anneau s’étrenne à l’annulaire d’un corps en transition, un fin duvet brumeux et humide gonfle le ciel. Les bustes de Marianne sourient et des cristaux de pluie virevoltent en courant d’air. Ça pique les yeux. De la neige de verre. Ce sont les anges martyrs, invertis, double peine, les déchirés en deux, le nez dans une enveloppe de chair inadaptée. Sur leurs ailes les crachats ont été si nombreux. Quand elle est culturelle la haine se sédimente. Le fantôme d’une coccinelle les regarde s’ébrouer, le ciel de la mairie se paillette, en nuées s’enchante un carrousel. Le mariage des licornes. Liberté et égalité, individu et citoyen, certificat, épouse-épouse, époux-époux, qui fait la femme ? se demande secrètement en les félicitant un membre de la famille.

Conjonction de courants et de tempêtes multiples qui actuellement convergent. Déplacement des urgences. Analyse des lipides et du bilan carbone. Saturation de l’air. Mesure face au délit. Pas besoin de sortir de Delphes pour lire dans le marc d’hashtags, ni que les astres soient alignés. L’apocalypse d’après Weinstein. L’avènement de la révélation. Les cavaliers sont en peignoirs et les porcs balancés dans un étang de feu. L’extinction de l’espèce avec elle un système, croyances et traditions. Le post-patriarcat n’est pas une utopie et à l’ère numérique les espaces se multiplient comme le temps s’accélère. Les faits s’accompliront. Mois à mois, décennies. L’autorité, déjà, comme la honte, change de camp.

De la cendre d’os de porc on fait la gélatine composant les capsules de nos médicaments, le silence des agnelles dedans réduit en poudre, le couteau sous la gorge et une langue dans la bouche, même les anxiolytiques deviennent durs à avaler. Des siècles de soumission, la voix basse et passive, proie, pâture, cible, à table ! servez-vous tant que c’est chaud.

Révolution haut-le-cœur, le corps social se cabre de voir jaillir l’acide, ses ulcères sont vivants, les abcès en collier se déroulent, se dévident, perle à perle, fil à fil, des ongles percent les miroirs. La vérité éclate et partout se répand. Paroles et gestes toxiques, digestion impossible, refluant, déferlante, harcèlements, agressions, un océan de tweets et la loi agitée. L’apocalypse d’après Weinstein, le réel se dévoile tel que le subissent les femmes, toutes les femmes, quelle que soit la façon dont elles le sont devenues. Perçues comme femmes, traitées comme telles, aucune classe sociale n’y échappe. Au commencement était #MeToo. Enfin… presque. Depuis que les réseaux existent, la quatrième vague féministe derrière les écrans se préparait. Internet libéra la femme là où Moulinex a échoué.

J’écris de chez les féministes hétéros qui se maquillent. Je serais volontiers restée chez les lesbiennes mais on ne fait pas toujours ce qu’on veut. J’ai été homosexuelle pendant 18 mois, un peu avant l’apocalypse de 2012. J’écrivais alors de chez les High Fem, c’est comme ça qu’on appelle les lesbiennes qui se maquillent et portent des escarpins. J’écris de chez les ex-bonnasses, les suffisamment cotées sur le marché pour avoir reçu des appels d’offres et avoir reçu le choix des options. J’ai été pute pendant 3 ans, c’était juste avant l’an 2000. On appelait ça « hôtesse de bar » : la fellation sur place, la baise à emporter. J’écris de chez les tox’ des boîtes à pharmacie, les thymo-déréglées, les internées, les dépressives, les maniaques, les bipolaires, les psychotiques, les obsessionnelles, les phobiques, les sur-émotives. Celles qui régulièrement arrêtent de suivre leur traitement et ont envie de se pendre passé moins d’une quinzaine. Celles qui compensent et décompensent. Les boulimiques, hyperphagiques, celles que des gens croient enceintes tant leur ventre en peu de temps est devenu énorme. J’ai lu tous les regards sur mon corps, du lubrique au dégoût. Connu l’œil effaré qui saisit la vendeuse quand on lui demande si elle a cette robe en 46 ? Abusé de la patience dont peut faire preuve un homme face à des cils battants en 90B. Si j’ai reperdu du poids, c’est ça cause des vêtements. J’écris de chez les connasses qui font du shopping, les adoratrices du vintage, les nostalgiques boudoir-cocotte, les esthètes de la penderie, les suicidaires de carte bleue hors soldes, celles qui parfois ne se lèvent que de pouvoir s’habiller. Celles qui passent pour l’ennemi, qu’elles soient lesbiennes ou pas dans n’importe quel milieu un chouïa militant pour cause de sursapage. Que celles qui n’ont jamais subi un concert de djembé en sandales à talons cessent de mentir tout de suite.

J’écris de chez les vraiment toutes seules, les orphelines, les nullipares, les célibataires à Paris, celles sans attaches ni branches qui dans le réel flottent, qui s’écrivent à la craie, leurs vies faites de falaises, qui ne savent pas qui prévenir en cas d’accident. J’écris de chez les sans-familles, celles qui doivent s’inventer chaque jour, de chez celles qui en rigolent, c’est une question de principes, la faiblesse est toujours une maladie honteuse. J’écris de chez celles qui ont des douleurs menstruelles effroyables, des bouffées de chaleur précoces et qui n’osent plus s’en plaindre de crainte d’être traitées d’essentialistes. Celles qui culpabilisent de ne pas être assez fortes, celles qui ont mis longtemps avant de crever leur trouille, celles qui perçoivent une sœur dans le cœur de chaque transsexuelle et admirent leur courage au point de puiser dedans, devenir celle que je voulais, personnage de fiction. J’écris de chez les chieuses, les princesses hystériques authentiques drama-queen, le donjon de la reine des pommes, les tellement meufs que dépassées, trop à l'aise avec leur féminité dans le débat public obsolète. Celles qui paraissent suspectes d’avoir trouvé leur place, celles qui doivent avoir honte d’être des proies faciles, celles qui devaient s’adapter pour ne plus être des cibles, celles qui désormais voient qu’elles forment partout légions mais ne savent pas tellement, une fois quittés le clavier et l’écran comment faire pour qu’enfin le réel se modifie. J’écris depuis 20 ans. En France, aujourd’hui, les écrivains c’est seulement 30% de femmes. Le langage a toujours été une chasse gardée. Qui possède le langage possédera le pouvoir. La vérité des faits est dans Lewis Carroll, de l’autre côté du miroir : « La question, dit Alice, est de savoir si vous avez le pouvoir de faire que les mots signifient autre chose que ce qu’ils veulent dire. » « La question, riposta Humpty Dumpty, est de savoir qui sera le maître, un point c’est tout. » Je suis maîtresse en ma parole et pour le partage du pouvoir, le langage, le choix de chaque mot relève du politique. La question est de savoir comment s’en emparer.

***

« Sororité », substantif féminin du latin soror, sœur. En latin médiéval, désignait une communauté religieuse de femmes. Rabelais l’a fait sortir de l’enceinte du couvent après le XVIe siècle. Le mot sororité devient une communauté de femmes ayant une relation, des liens, qualités, état de sœurs. Hors de la loi et la famille. Une relation, l’état de sœurs, le sang n’y est pour rien si ce n’est le menstruel, une solidarité, rapport de similitude, le partage d’une condition en dépit de ses pluriels. Hors de toute hiérarchie et même sans droit d’aînesse, une relation, des liens. Ici pas de mamatronne. Qualité, état de sœurs. Un mot plutôt joli, quatre syllabes rondes, souriantes, qui encerclent, susurrent la possibilité d’une union féministe en milieu naturel. Dès le XVIe siècle la langue le permettait. Puis le terme a disparu totalement de l’usage après le XVIIe, ça a duré longtemps, on se demande bien pourquoi ?

Hypothèse 1
Hypothèse 1 : l’Église appréciait peu qu’en dehors des couvents des regroupements de femmes solidaires hors contrôle puissent être envisagés. Du coup ses représentants expliquèrent que c’était mal de trainer entre filles parce que ça rend lesbienne, ce qui déplait à Dieu au point d’ouvrir l’enfer à qui s’en rend complice.

Hypothèse 2
Hypothèse 2 : les hommes appréciaient peu qu’hors de leur autorité les femmes s’imaginent exister. Par la sororité surgit l’indépendance, l’autogestion, pire encore : l’auto-détermination. Du coup ils convainquirent leurs épouses et leurs femmes d’écouter le curé et de se concentrer sur les charges domestiques et la reproduction de l’espèce.

En 1634, un homme d’Église et d’État, le cardinal de Richelieu, fonda une institution encore en fonctionnement, l’Académie Française. Depuis janvier 1635, la mission de celle-ci est de veiller sur la langue, de la normaliser, de la perfectionner, de l’uniformiser. On pouvait dire « autrice » dans le langage courant, comme on disait « lectrice » à l’époque. La féminisation des métiers s’appliquait de soi. Il s’agissait alors de nommer le réel ou de l’anticiper. Le dictionnaire n’est pas responsable, ce sont les hommes en habit vert qui s’escriment à le mutiler. À la pointe de l’épée les curetages se succèdent, les mots et leurs vertus peu à peu rapetissent et bientôt s’évaporent. Quand un mot n’est plus dit, qu’il n’est plus prononcé, ce qu’il désigne aussi disparait des esprits.

L’Académie Française : des hommes régissent la langue. Le patriarcat sévit en immortel depuis 1635. Une communauté de femmes, soudées et solidaires, juste parce qu’elles partagent quoi ? La possibilité de décéder en couche ? La culpabilité de ne pas mourir à la guerre ? Une communauté de femmes, ce qu’elles peuvent faire ensemble, mise à part caqueter dans de nouvelles toilettes ruineuses pour le ménage ? Notons que dès le XVIIe siècle, la question s’est posée et fut vivement réglée. Une communauté de femmes liées dans un état de sœurs : manquerait plus qu’elles s’instruisent !

Le mot sororité est sorti de l’usage et s’est fossilisé. Une communauté de femmes, c’est un ressort comique, en France dans nos classiques comme la réalité.

Les précieuses ridicules est une pièce de Molière représentée à Paris en 1659. La Commission des Précieuses Ridicules est le surnom endossé par les chercheuses qui travaillaient avec Yvette Roudy pour féminiser les noms de métiers, les grades et les titres auprès de l’Académie Française en 1984. « Le Français est la langue de Molière, ici reste l’héritage maudit des femmes savantes. »

Même celles des années 80, pourtant femmes jusqu’au bout des seins et ayant réussi l’amalgame de l’autorité et du charme selon Michel Sardou, ce qui n’est pas nommé n’existe pas. C’est valable tout le temps et parfaitement partout. Ne négligez pas l’impact de la chanson française, surtout de variété, sur la population.

Sororité, communauté de femmes ayant une relation, des liens, qualités, état de sœurs. L’important c’est de comprendre qu’en oubliant que ce mot existe, les femmes ont perdu le concept avec, autant que les hommes qui les regardaient. Sororité, ça voulait dire : les femmes deviennent une caste, une classe, plus dangereux que le communisme à l’échelle internationale, un incendie dans chaque foyer. Aucune révolution ne fera tomber le gland de la phallocratie. On peut tuer le roi et dénoncer son frère, mais la bite, on ne touche pas, sauf si papa demande.

Lorsqu’un mot disparait de l’usage, c’est que plus personne n’en a l’usage, souvent parce qu’il désigne quelque chose qui n’existe plus. Par exemple les vespasiennes, le métier de rémouleur, la notion de cadre maison ou les wagons fumeurs. Il arrive par ailleurs que certains mots perdurent au fronton d’édifices qui se veulent rassurants bien que tous aient été évidés de leur sens : liberté, égalité, fraternité par exemple.

« Fraternité », de frater, frère. Tout comme sororité, fondé sur le latin médiéval. Un rapport fraternel, des liens fraternels, un lien affectif et moral. Frères hors du sang mais bien frères d’armes qui guerroient et connaissent le rire du sergent ou à défaut se défient chaque soir, courbés, tendus, écrans, manettes. Fraternité universelle puisque l’homme prit une majuscule et le relais immédiat des dieux pendant que nous préparions le dîner. C’est important de bien manger.

Sororité. Les Parisiennes vont chercher le roi à Versailles le 5 octobre 1789. Le peuple a faim, elles veulent du pain. Une fois que les grilles ont cédé, les émeutiers poursuivent, faire la révolution : une affaire de bonhommes. Elles ont été utiles mais que ça reste discret et qu’elles soient bien mignonnes de rentrer coucher les gosses, d’autant que sans surveillance, ils doivent faire des conneries.

Si le mot sororité avait été d’usage, la façade des mairies aurait été changée : liberté, égalité, sororité par exemple ; et les bustes de Marianne auraient probablement deux tailles de bonnet de moins.

Les mots sororité et fraternité, bien qu’apparus ensemble, n’ont pas eu le même destin. Pour autant, aujourd’hui, en ce qui concerne la devise républicaine, pardonnez-moi mais j’y reviens, fraternité : obligation morale, devoir de la nation envers ses citoyens, droit à la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs, les congés parentaux, la retraite des travailleurs. Est-ce qu’un mot garde son sens quand tout ce qu’il désigne est devenu obsolète ? Est-ce qu’un mot a sa place quand tout le monde le défend mais que plus personne ne le ressent, ne l’applique ni ne l’utilise ? C’est quand même une question qu’il est sain de se poser.

Pensez-vous qu’aujourd’hui les Parisiennes forceraient les grilles de l’Élysée pour réclamer du pain, l’égalité des salaires, le droit aux congés menstruels, la PMA pour les copines, un bon d’achat pour un produit du groupe LVMH, faire un selfie avec le chien présidentiel ? Merci de développer, exercice en une heure.

Sororité, substantif féminin du latin soror, sœur, tout comme le mot fraternité est tiré du latin frater. Tandis que le mot fraternité connait un succès retentissant, sororité depuis des siècles a été jeté aux orties, peut-être même enfoui profondément sous terre, exprès, le plus profond possible. Sororité fossilisée, de la roche, un petit caillou, une boule végétale mais si sèche, des syllabes qui semblent étrangères et parfaitement inanimées. Sororité : le mot dort sous terre, on le croit mort, il va se réveiller…

Nous sommes dans une forêt française, peu avant 1940. Un campement, des jeunes filles, une communauté de filles et un état de sœurs. Ensemble, ce soir-là, elles cherchent autour du feu comment nommer leur lien. Elles portent un uniforme : chemise, foulard et jupe-culotte. Elles appartiennent aux scouts de France. Activité non mixte, un rapport spécifique entre femmes, un usage, une nécessité de nommer ce qui existe. Autour du feu, après les chants, les filles s’interrogent sérieusement : trouver le terme équivalent serait d’utilité publique. Un scout est toujours prêt à faire une bonne action. Les guides et les aînées recherchent dans leur manuel, leurs souvenirs, leurs leçons de vocabulaire, d’éventuelles pages du Nouveau Testament. Lapinette Pieuse et Loutre Savante ne peuvent se résoudre à l’hypothèse de parler une langue non équitable. Un mot existe quelque part puisqu’elles en font ici l’usage. Hélas, dans ce campement, en pleine forêt française peu avant 1940, aucune n’a amené de dictionnaire, ni prêté attention au sac de couchage vide dans la tente des louvettes. Fracas. Chutes. Hurlements. L’écho d’un éboulement qui engloutit lentement le dernier appel au secours. Identification. Chevrette Curieuse, neuf ans. L’infortunée enfant, par l’envie emportée s’est éloignée des tentes vers les profonds fourrés. Aussitôt, c’est la meute toute entière qui s’élance, en s’armant de courage, de lampes torches, d’une boussole, de cordes et de bâtons. Pauvre Chevrette Curieuse, une plongée dans la pierre, le cœur des bois profonds n’est jamais fait d’argile. Le sang n’y suffit pas, des larmes et de la sueur, des nœuds et des astuces, l’urgence, entre filles… bonne action. En magie, sang, larmes, sueur, ça donne corps à la force mentale, ce sont des extraits de vie pour que prennent vie les souhaits. Peut-être que c’est pour ça qu’en tombant dans l’abîme où le mot sororité avait fossilisé, le sang de Chevrette Curieuse, ses larmes autant que celles de ses sœurs paniquées, la sueur de leurs efforts, le mot sororité est revenu à la vie.

La faculté de reviviscence, certains mots l’ont, tout comme ces plantes qui au contact de l’eau reprennent forme et croissance. Une Rose de Jéricho, plante de résurrection, désert, fleur de rocher.

Peu avant 1940, le scoutisme féminin déterra le mot sororité de l’oubli afin de l’utiliser durant quelques années avant de lui préférer le terme de sestralité de manière définitive. Ce sont les faits réels, les données à retenir… mais vous savez très bien que sans sacrifier une chèvre on ne peut pas maintenir l’attention de l’auditoire.

Sororité, utilisé et rejeté au profit de sestralité. Le mot était adapté, aussi n’est-il pas incongru de demander pourquoi. « Sestralité sonne mieux, semble plus élégant », « variété des nuances » : arguments non recevables, ici pas de poétique, ce qui se joue ici relève du politique et en dépit du plomb, pas d’alchimie du verbe.

Qui était attentif avancera sans axiome une probabilité : scoutisme et guides de France, foi, pratique catholique, un lien avec l’Église. La formule reste immuable autant que le danger, couplet au goût du jour mais toujours le même refrain…

Une assemblée de femmes qui se délivrent du mal, manquerait plus qu’elles inventent leur propre façon de penser ! de vivre, de s’organiser, carrément un système. Pire que le communisme, debout ensemble, pluriel de femmes, qu’entendrons-nous dans nos campagnes si elles n’accouchent plus de soldats ? Si nos compagnes désertent nos bras, ne risquent-elles pas de nous égorger ? Aucune instance soumise à un dieu ou un maître n’a intérêt à voir le mot sororité se propager de bouches en bouches, s’incarner dans des actes et des comportements.

Copine entends-tu
Le pouvoir de ce mot sur nos peines ?
Copine entends-tu
Les cris sourds de nos vies qu’on enchaîne ?
Ohé, féministes, ouvrières, absolutistes
C’est l’alarme
La sororité modifie le gout du sang
Et des larmes



Il a fallu attendre les années 1970 pour que sororité revienne, soit prononcé, écrit. Ce sont les féministes françaises qui l’ont réinvesti. Aux États-Unis leurs homologues venaient de composer le terme sisterhood, sur le modèle de brotherhood. Un néologisme militant, la volonté d’ancrer dans la langue un mot qui désigne des liens, des affinités, un vécu commun au-delà des classes et hiérarchies, inhérent au partage de la condition féminine. Ces liens entre hommes avaient un mot, ceux entre femmes n’existaient pas. Ce qui n’est pas nommé n’existe pas. Sisterhood en anglais, ce n’est pas sorority, il ne s’agit pas ici de campus américain, de sororité étudiante, la notion même de sélection et de bizutage, de hiérarchie, de promesses prononcées, de nécessité de formuler le lien pour l’acter. Ce que le mot décrit, c’est le mouvement contraire.

Le terme sororité implique l’horizontal, ce n’est pas un décalque du patriarcat. L’état de sœur neutralise l’idée de domination, de hiérarchie, de pyramide. La qualité de sœurs, expériences, âges multiples, le cercle de parole qui s’écoute en égales. Différentes mais égales. Qui possède le langage obtiendra le pouvoir, le pouvoir absolu, celui où dire c’est faire. Un féminisme actif, le retour de sorcières d’autant plus dangereuses qu’elles ont appris le sort d’unité.

« La seule chose que toutes les femmes partagent, c’est le fait d’être perçues en tant que femmes et d’être traitées comme telles. » Cette phrase est de Julia Serano et résout la faille des pluriels. Le féminisme devient soluble au contact catégoriel. Julia Serano est une biologiste et militante féministe américaine, spécialisée dans les études de genre. Elle n’est pas née femme, elle l’est devenue après avoir traversé, habité et expérimenté des états queer et flous vraiment de l’intérieur.

La sororité n’est en rien une question d’affect, c’est une éthique de vie, ce que les femmes partagent, qu’elles se trouvent au-dessous ou au-dessus du plafond de verre. Mieux que le communisme, un féminisme actif. Pour qu’un mot devienne la vie pas besoin de magie ni de bouc émissaire. Le sang, les larmes, la sueur, liquider les formules qui ont trop fait recette. De la sororité au féminisme actif il y a trois pas de fourmis.

La sororité permet de créer un nous hors de toute hiérarchisation individuelle des urgences personnelles et combats collectifs. En constance, état de sœurs, relation, qualité des liens. En fil de soie se tissent des communautés de femmes qui forment et créent des « nous ». Le mot sororité désignait toutes ces « elles » qui devenaient des « je », des essaims de « je » en forme de « nous ». Des « nous », un « nous » de femmes, de perçues et traitées comme telles.

Sororité, le mot existe, son réel à notre portée. Le pouvoir vertical est déjà érodé, les liens se forment en cercle (?) et les femmes s’organisent, elles ont beaucoup d’alliés, les enfants de papatron n’ayant pas très envie de reproduire le modèle. Le système patriarcal est devenu obsolète aux yeux mêmes des vaillants autoentrepreneurs. L’occasion, c’est un fait, relève de l’historique, ce serait un peu dommage de passer à côté…

C’est pour ça que j’écris, mes ami·es inconnu·es, pour que circulent les armes autant que la parole, pour que se pense un monde hors de toute érection, ni déesse, ni maîtresse. Modifier nos rapports à la domination, faire brûler les échelles avec les sets de table. Surtout abandonner les concours de bonnets. En moule à gâteaux ou en seins, reste en commun la silicone, c’est valable pour la moon-cup alors ne faites pas les malines. Puisque pas de matriarcat, entendons-nous l’alternative ? Mon ami·e inconnu·e, pas mon enfant, ma sœur, outil, sororité, un rapport entre femmes qui renverserait la donne autant que la devise inscrite sur les frontons. Fraternité existe, sororité aussi. Utiliser ce mot c’est modifier l’avenir.

Copine entends-tu
Le pouvoir de ce mot sur nos peines ?
Copine entends-tu
Rire ce jour où ma vie vaut la sienne ?
Ohé, féministes, ouvrières, absolutistes
C’est l’alarme
La sororité modifie le gout du sang
Et des larmes
Rangez vos ( ?)
Être sœur c’est plus qu’être camarades
Sortez les cisailles, les hashtags
Qui mitraillent les grillades
Ohé harceleurs priapiques adipeux
Courez vite
Ohé prédateurs, attention petits pourceaux
Ça retweete
C’est nous qui brisons le cristal
Comme le plafond de verre
Sororales secousses
Neutralisez la frousse tenancière
Il y a un pays des femmes
Une utopie et une trêve
Et si nous vois-tu rivales et séparées
On en crève
Ici chacune sait ce qu’elle veut
Ce qu’elle fait
Qu’elles en passent
Allons inconnu·es
Ce n’est pas que sur Facebook
Que ça se passe
La sororité, lien et confiance pour contrer
La déroute
Chantez sans canon
Désormais nous sommes paroles
Qui s’écoute

La sororisation, c’est l’action de sororiser. Sororiser, c’est rendre sœurs. C’est créer, par la qualité des liens une relation qui amène à l’état de communauté féministe. Une communauté soudée, animée par la même volonté de déjouer les stratégies paternalistes et la violence sexiste ordinaire, terreau fertile aux viols, aux uxoricides.

La sororisation c’est aussi former le cercle qui enserre le réel pour le modifier tout de suite, le rendre respirable, éradiquer les pressions et tensions dans la pièce, empêcher toute suprématie couillidienne de s’établir. Un pacte tacite et immédiat. Un pacte de non-agression, très concrètement, pour commencer.

La sororité est une démarche consciente, un rapport volontaire à l’autre. La sororité relève de l’intime et du public, parce que dans le privé faut quand même pas charrier on a toutes des frangines sur qui on peut compter avec qui on fait bloc, des piliers dispersés, un socle ou une grosse team. Le mot sororité, c’est toujours pratiquer, faire bande ce n’est pas le plus difficile. Le plus difficile, c’est de modifier le regard que l’on pose sur une fille. La méfiance. L’ironie protectrice. Les tests. Ce qu’on se dit dans sa tête, les tous premiers réflexes, ce qui va alimenter la dissolution de la sororité au contact de l’espace public ensuite, aussi.

Pour ça, faire acte de confiance, la même confiance a priori que l’on a en l’absence du corps, en ligne, dans un espace virtuel, envers une amie inconnue. De l’empathie, se mettre à sa place. Souvent l’autre femme aussi a peur, envoyer des signes bienveillants, ne jamais tirer la première, vérifier que le scud n’est pas une maladresse. Dans ce cas, et seulement dans ce cas, alors le droit d’atomiser en appliquant le choc en retour. La sororité c’est pas non plus « marchez-moi dessus mesdames », on n’est pas chez mémé.

Nous subissons cette société parce qu’affaiblies par la rivalité, l’agression par réflexe et surtout la violence dont peuvent faire preuve auprès des plus faibles les femmes devenues fortes. Celles qui s’en sont sorti. Exercice du pouvoir et absence d’empathie. Souvent par ailleurs mères, elles se refusent à être sœurs. À noter également que le syndrome de la schtroumpfette fait encore des ravages indépendamment de l’âge et du type de milieu. Néanmoins, ne jamais oublier : on ne nait pas mamatronne, on le devient. Ancienne victime devenue ogresse, de s’être débrouillées seules leur cœur peut être tanné.

La sororité est une attitude : ne jamais nuire volontairement à une femme, ne jamais critiquer publiquement une femme, ne jamais provoquer le mépris envers une femme. La sororité est incluante, sans hiérarchie ou droit d’aînesse, cercle protecteur, horizontal.

La quatrième vague est visible, ce qu’il faut c’est l’entretenir, la gorger, la nourrir, pas se contenter de surfer dessus. La déferlante peut être fragile, l’occasion historique manquée. Pour ça, il va falloir agir, au-delà de l’écran et du clavier. Le décalage entre le dire et le vécu est encore abyssal, il faut que se poursuive l’essor pour que s’affirme le tsunami.

Intime, privé, public, des astuces à trouver pour l’avènement d’un monde féminin décomplexé fun et tripant, cela va de soi. Neutraliser la gaudriole, conserver le sens de la rigolade.

Les Français sont de grands enfants, le jeu est la meilleure des armes. Puisqu’il s’agit au fond d’un jeu de société, redistribuer les cartes, changer la forme des pions, se déplacer sur le plateau, inventer d’autres règles. Modifier les enjeux. Le jeu du Badaboum est un vieux jeu d’adresse et d’équilibre. Le but est d’empiler les pièces de bois jusqu’à la chute. Une pièce de trop et BADABOUM. Lorsque sur le plateau social un représentant du papatronat empile les remarques sexistes ou paternalistes, les joueuses en présence ont pour but de lui faire perdre l’équilibre en les ponctuant d’un BADABOUM. Je sais que là vous vous dites : « quelle idée à la con ». Je vous comprends, vraiment, je vous avoue que moi-même sur le coup j’ai hésité. Mais je l’ai testée pour vous avec quelques copines. Tu la sens bien, chéri, ma grosse déconstruction ? À partir de deux joueuses, peut se pratiquer partout, ne convient pas en présence des enfants de plus de 18 mois.

Ça y est on a un regard. Intervenir dès lors qu’une femme est en danger, insultée, agressée, harcelée dans un espace public : les transports en commun, l’open-space du plateau sur lequel on travaille, l’escalier de son immeuble où s’effondre la voisine. Une connivence tacite, communauté complice aux liens indéfectibles

Faire le deuil du bitchage et des glaires clandestines. C’est un vrai sacrifice. C’est un peu comme Buffy, la mort est notre cadeau. Mais la phallocratie est un mauvais objet nettement plus adapté.

De même, on évitera d’employer le terme « connasse ». Même si on le pense très fort. Ce n’est pas de la censure, c’est juste un petit effort. Le coût d’un trait d’esprit au profit d’autre chose, quelque chose de nouveau, pour que toutes de notre vie nous soyons l’héroïne.

Appliquer à soi-même le test de Bechdel. Parler chaque jour avec des femmes de quelque chose qui est sans rapport avec un homme. Attendu que vous ne pouvez pas dire de mal d’une autre femme, vous devez de part et d’autre être plus créatives. Peut-être plus sincères aussi. Dépouiller des habites de la conversation, partager ce qui vous occupe. Nota bene : les enfants ça ne compte pas, c’est comme la météo.

Ne plus avoir peur de rien désormais puisque unies. Le patriarcat s’effrite, qui sont vraiment ces hommes qui nous maintiennent à genoux ? Observez bien l’espèce nommée « baby boomer » : à droite, la main de ma sœur dans la culotte du zouave, à gauche les barricades « cimetière des éléphants ». Bientôt à la retraite, les derniers mâles alpha courent après l’infirmière en déambulateur. D’ici une décennie tout sera modifié. En attendant, chaque jour faire face à leurs pulsions en se dressant en groupe, rien n’est plus efficace que l’intimidation.

Les fictions virilistes, même les hommes n’en veulent plus. Pour les plus de 50 ans il se peut que se soit foutu mais ça laisse de la marge. Ma propre génération était adulescente, les trentenaires sont ouverts, les autres sont des fils. Les us et les coutumes, une question de costumes et d’usage du langage.

Rappeler à l’ordre, oui, après tout il faut bien pour que joue l’histoire, qu’il y ait maitresse du jeu et dans ces nouvelles règles, aucun être vivant ne prononce « ma petite » devant votre prénom ni ne dégrade une femme en votre présence sans provoquer votre réaction. La sororisation c’est une nouvelle partie, où la victime devient par ses sœurs héroïne, où les femmes sont perçues et traitées dignement.

La sororisation, c’est expérimenter l’idée d’une connivence à l’échelle nationale, débouler BADABOUM, joyeusement foutre en l’air ce qui reste des mâles alpha, pour l’avènement d’un monde qui mérite qu’on soit dedans.

Une utopie à portée de main, livrée avec son mode d’emploi. Ce serait vraiment dommage de passer à côté.


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