Johnny Boy / Et ça ne doit pas être un drame




Ça y est… le bout du tunnel. Finir cette série d’articles, c’était important. C’était comme un caillou dans ma chaussure. Concluons : j’ai quitté dix fois Johnny Boy, mais la onzième était la bonne. Et ce fut un drame. Le drame qui m'a permis de chasser mes démons.









VII. Et ça ne doit pas être un drame.

Rodolfo Loaiza - Paloma negra
Ensuite, j'ai pleuré, beaucoup, beaucoup, c’était un putain de drame. J’ai mis tellement d’énergie dans cette histoire que je suis retombée comme un soufflé hors du four. Pendant tout ce temps, je me suis dit le matin en me levant que c’était normal de galérer et en me couchant qu’on n’y arriverait jamais (parfois l’inverse). J’ai pris avec philosophie ses premiers errements, ensuite je suis devenue beaucoup moins magnanime. Par ailleurs, je suis en mode Overkill depuis des lustres (deux ans en fait), moi aussi j’étais désolée de ne gérer ces émotions-là que comme ça : ça me rendait la patience toute riquiqui, mon féminisme était exacerbé, je tirais à boulets rouges sur tout ce qui bouge, je n’aimais personne, je ne sortais plus, je m’habillais mal et je fumais trop. Le mode Overkill, c’était tout ce que détestait Johnny Boy : chiante et infréquentable. Et t’imagine, il a fait de moi sa bergère, pardon mais je ne n’étais pas la seule folle inconsciente là. On moulinait dans nos contradictions, faut pas croire… Mais est-ce que notre histoire s’est résumée à une suite de règles qui n’ont pas été respectées ? Ah ah oui, c’est un peu con à dire mais non, faut pas pousser non plus.



À défaut d’avoir reçu son amour, j’ai eu son amitié peut-être, c’est-à-dire son écoute, sa gentillesse, mais elle s’est rétractée avec nos disputes, notre séparation et peut-être plus encore avec la suite de réactions que j’ai eues après ça : la colère, la peur, le déni etc. oui ça s’appelle un deuil. J’étais investie à ce point dans cette relation, j’aurais pas dit, je n’aurais pas dû, je n’en reviens toujours pas.

Rodolfo Loaiza - Drunk on love
On s’est quittés en juillet 2018. C’était plus ou moins clair que nous étions séparés en septembre, mais on avait laissé la porte ouverte, pour plus tard, peut-être. Un soir, complètement dans le mal, je l’ai recontacté, pour une nuit. Il a dit non, je crois que c’est le seul moment où il a été franc avec moi. Là, il a été prudent, lucide. Honnête. C’était tellement une grosse connerie de lui demander ça. Alors que je répétais depuis des mois que je ne voulais pas être son plan cul. C’est là que j’ai vraiment compris. C’était fini. J’ai hurlé de douleur pendant des. putains. de. semaines. J’étais pathétique.

Il avait un peu pitié, il s'est montré compatissant (à bonne distance) et je crois bien que j'espérais qu'il me reprenne, juste pour que je sois pas triste. Bonjour la qualité de la relation hein, la relation par pitié. Tout ce que je déteste chez les forceurs : "donne-moi une autre chance", "je ne peux pas vivre sans toi", "je vais me foutre en l'air" etc. J'y repense avec honte, douleur, dégoût.

Les mois ont passé et c’est resté longtemps aussi frais que si c’était hier. J’ai bloqué à mort. Je me suis flagellée méthodiquement pour me ramener à la raison mais ça n’a pas marché. J’ai retourné le truc dans tous les sens, je ne trouvais rien, rien qui expliquait mon comportement. Tous mes warning étaient au rouge, j’avais tout ce qu’il fallait pour être sûre que ça n’allait nulle part, mais mon ego était impératif : j’avais besoin de ce mec. De la part d’un truc aussi fragile que mon ego, c’est cocasse d’exiger des choses complètement débiles comme ça, non ? J’étais à deux doigts de déduire que quelque chose que je ne voyais pas mais qui est très très puissant agissait en loucedé sur mes fonctions cognitives, genre matière noire, ou hormone, je ne savais pas.



Rodolfo Loaiza - The end
Il a fallu tomber très bas, pleurer pendant des mois, supplier encore longtemps, cesser de m’alimenter, me décharner, penser au suicide pour finalement me faire hospitaliser et me faire soigner sérieusement. Il m’a fallu quatre mois de plus pour bien comprendre dans quelle boucle maléfique je me trouvais.

Donc voilà, c’est officiel : maintenant je connais le chagrin d’amour, c’est super pas marrant. En analysant un peu le truc, tu te rends compte que c’est essentiellement à base de comportements compulsifs malsains, dans lesquels on pourrait se vautrer rapidement si on s’y laisse aller : sentiment d’appartenance, peur de l’abandon, jalousie, harcèlement par SMS, injures, envie d’étrangler, suicide, grosso modo, c’était ma liste au Père Noël cette année-là.

Tout ça dépassait largement mon histoire avec Johnny Boy ; ça avait tout à voir avec mon histoire familiale, les violences et les prédations psychologiques que j’ai subies, les erreurs de parcours où je me suis enferrée. Pour faire simple(cf ma série d'articles Ψ pour plus de détails) :

- j’étais incapable de faire confiance à un homme ; j’avais trop subi.
- pourtant je demandais à Johnny Boy de redresser les torts qui m’ont tordue, en réparation, et comme gage d’amour.
- je fondais ma vision de l’amour libre sur mon expérience de l’échangisme que j’ai vécu avec mon ex-mari, et qui m’a fait tant de mal.
- à l’inverse je fondais ma vision du couple en négatif, en réaction à mes échecs passés, comme un balancier qui va d’un bord à l’autre. Loin de l’équilibre.
- le sexe était une zone de danger, à cause des viols, de la maladie.
- j’étais encore profondément (et je le suis encore, c’est ce que je travaille actuellement avec ma psy) conditionnée à me conformer aux désirs de l’autre, au point de ne pas supporter que les miens ne soient pas satisfaits. Je vivais, avec ces deux impératifs contradictoires dans le même corps, dans la même tête, déchirée. Incompréhensible.
- enfin, j’étais dans un tel manque d’affection, la dépression avait déjà tellement marqué ma vie, que j’étais là, à crever la gueule ouverte.

C’était la guerre en moi. Je souffrais comme pas permis. Nous n’avions aucune chance. Et si j’avais été plus équilibrée, probablement que je n’aurais jamais commencé cette relation.

Cela fait plus d’un an que c’est fini. Nous nous sommes revus une dernière fois peu de temps après ma sortie de l’hôpital. Puis plus rien. Et c’est bien ainsi. Je ne lui en veux plus. J’ai cessé de pensé à lui chaque jour. J’ai effacé nos échanges de textos. Je me suis débarrassé de tout ce qui pouvait avoir un lien avec lui. Sauf un briquet, que je n’utilise pas, vu que je ne fume plus. Mais juste pour me rappeler : attention, ça brûle.

Adieu, Johnny Boy.



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