Le Tzolkin : petite introduction à l’astronomie maya
Il y a quelques jours, j’ai aguiché mes twittas avec une
histoire de calendrier qui serait aussi un journal intime, un oracle et une
philosophie de vie. Cette chose existe : c’est le Tzolkin. Mais avant de
te parler de la manière dont on peut l’utiliser aujourd’hui, je voudrais te
parler de ceux qui l'ont fait : Hunab Ku, les Mayas et José Argüelles. Laisse-moi te les présenter.
LES MAYAS
C’est un très vieux truc, le Tzolkin. Les Mayas sont les représentants de l’une
des plus anciennes civilisations d’Amérique puisque les peuplements humains
sédentarisés sont attestés autour de JC-3000 dans la péninsule du Yucatán. Cette
population fascine les historiens occidentaux à cause de sa propension à compter
et à observer les étoiles. Mathématiques et astronomie sont deux formes
de connaissances fondamentales pour explorer une troisième connaissance :
calculer le TEMPS. Ces trois domaines font incessamment l’amour entre eux dans
l’histoire humaine, si j’ose dire. Chez les Mayas, c’est une orgie !
Avant de poursuivre il faut dire que la
culture maya est éteinte, elle battait de l’aile avant l’arrivée des colons espagnols, qui ont
ensuite passablement saccagé ses cendres. Globalement, il ne reste pas
grand-chose qui ne soit pas en pierre ou en or, les prêtres européens ayant
brûlé tout ce qui ressemblait à un livre. Leur écriture, logiquement, n’a pas
été déchiffrée avant la fin du XXe siècle. Elle est un peu
unique au monde : à la fois logographique (elle dessine les mots) et
syllabographique (les dessins font aussi des sons) elle est surtout gravée avec une grande liberté artistique sur des murs branlants,
en pleine jungle. Comprendre qui étaient les Mayas est l’une des aventures les
plus curieuses de l’archéologie moderne. S’il y a une chose qu’on ne peut pas
ignorer dès qu’on met le nez dans leurs vestiges, c’est leur goût des maths et
des dates. Au vrai, toute la péninsule méso-américaine précolombienne comptait
et regardait le ciel, le calendrier « maya » était partagé par toutes
les cultures de cette région du monde. Mais ce sont les Mayas qui lui ont donné
une profondeur et une subtilité si poussées.
Les Mayas adoraient les mathématiques comme on adore un dieu. Ils avaient notamment grand amour des nombres 13 et 20 ainsi que
de leurs multiples 26, 52 et le sacré 260 (= 13 x 20). 20, c’est leur base de calcul et de numération (vigésimal). Ils
avaient le 0 et même plusieurs, bitch
please ! Et 13, c’est leur nombre préféré parce qu’il va bien avec 20.
Te décrire avec ne serait-ce qu’un peu de précision leur numération et leurs
systèmes de calcul prendrait beaucoup de temps et de place, j’invite donc ta
curiosité à explorer la question si
elle t’intéresse, mais en attendant, il te suffira de savoir que 1 point = 1 et
1 barre = 5.
Tu fais tout avec ça, tu vas au bout de
l’éternité infinie si tu en as envie. Les Mayas étaient un peuple très
religieux, les mathématiques c’était un peu le langage des dieux puisqu’ils
permettaient de décrire le mouvement des astres et la course du temps.
Dresden Codex |
Ils possédaient un système calendaire très rigoureux, qui
reprenait la structure typique en méso-amérique précolombienne, basée sur ce
fameux rythme 13*20 mais en vachement plus sophistiqué puisqu’ils vont
s’appuyer sur l’observation des révolutions de la Terre autours du Soleil (qui
signale solstices, équinoxes, saisons…), sur les phases de la lune (mois) ou
celles de Vénus pour obtenir un jeu
de calendriers fonctionnant ensemble, sur de très, très longues périodes.
L’idée, qui n’étonnera personne, c’est qu’on peut imbriquer les unes dans les
autres les unités de temps et utiliser différents éléments célestes pour
matérialiser des cycles. Notre système à nous utilise les unités
suivantes : seconde, minute et heure, jour, semaine et mois, année, siècles et millénaires. Seule l'archéologie utilise les millions d'années.
Quoique très irrégulier (base 10 mais rythme 12*60, les heures qu'il faut ajuster deux fois l'an, les mois qui ne se ressemblent pas, les années plus longues que les autres...), ce système est plutôt pratique socialement,
il est d’ailleurs là pour rythmer la vie de la cité : organisation du
travail, prélèvement de l’impôt, détermination des cycles agricoles. Notre
décompte du temps est très administratif : il est fait pour que tu ailles
bosser, en alternant avec des congés. L’autre avantage de notre système de
temps, c’est qu’il « tient ». Il est assez précis pour tenir dans le
temps sans trop se décaler par rapport aux mouvements de la Terre et du Soleil.
Les Mayas, au début de l’Histoire humaine,
ont mis au point un décompte du temps aussi précis que le nôtre et encore plus
pratique (plus fluide et perpétuel en fait). Eux aussi étaient très
administratifs, ils utilisaient au moins cinq calendriers : le Tzolkin (le
compte sacré de 13 x 20 jours), le Tun’uc (calendrier lunaire de 13 x 28 jours), le
Haab (l’année de 365 jours), un calendrier rituel de 18 980 jours et un compte
long vachement long de 1 872 000 jours. Parce qu’au contraire de nous ils ne
déliraient pas sur les petites unités (secondes, minutes et heures), mais sur
les grandes. Ils avaient un ego cosmique, les mayas, ils pensaient en Baktuns.
- le kin, jour
- le uinal, période de 20 kinob (20 jours)
- le tun, période de 18 uinalob, soit environ un an (360 jours)
- le katun, période de 20 tunob, soit environ 20 ans (7 200 jours)
- le baktun, période de 20 katunob, soit environ 394 ans (144 000 jours)
- le pictun, période de 20 baktunob, soit environ 7885 ans (2 880 000 jours)
- le calabtun, période de 20 pictunob, soit environ 157 700 ans (57 600 000 jours)
- le kinchiltun période de 20 calabtunob, soit environ 3 millions d'années (1 152 000 000 jours)
- le alautun, période de 20 kinchiltunob soit environ 63 millions d'années (23 040 000 000 jours)
- le hablatun, période de 20 alautunob soit plus d'un milliard d'années (460 800 000 000 jours)
>> Un article éclairant sur le site du Point Culture.
Ce sont de grands cycles, qui s’emboîtent les uns dans les autres de manière fractale avec de plus petits cycles identiques. Ce qu’il y a d’amusant, c’est que le décompte maya fonctionne bien avec notre décompte à nous, parce qu’ils ont fixé la durée d’une année aussi précisément que nous, à savoir 365 jours + quelques savants bidouillages pour que tout ça reste bien aligné avec la course de la Terre autours du Soleil le plus longtemps possible (une année solaire dure un peu plus de 365 jours mais un peu moins de 366).
Le calendrier grégorien est ainsi
constitué de 12 mois de 28, 30 ou 31 jours, avec un jour « en plus »
les années bissextiles, tous les 4 ans (le 29 février).
Les Mayas s’y prenaient autrement, mais
avec exactement le même résultat - et en jonglant avec tous les calendriers en
même temps. Leur année solaire (Haab) était faite de 18 mois de 20 jours (1
tun) auxquels ils ajoutaient 5 jours « sans âme » (360 + 5). Et tous
les 52 ans, ils ajoutaient encore 13 jours « sans âmes » et bim le
compte est bon. Dans leur calendrier lunaire (le Tun’uc), ils avaient 13 lunes
de 28 jours, soit 364 jours, à la fin duquel ils ajoutaient 1 jour « hors
du temps. Ils y ajoutaient encore 13 jours tous les 52 ans et le compte est
rebon.
Le Calendrier des 13 lunes que je vais
vous présenter est une adaptation moderne de ces calendriers solaire et lunaire :
il exploite la concomitance parfaite des calendriers mayas et grégoriens. Il
fonctionne avec 13 lunes de 28 jours mais répartit les 13 jours « sans
âme » au fil des années bissextiles, le 29 février. Qui l’a adapté ?
et pourquoi ? te demandes-tu ?
Eh bien c’est José Argüelles qui a commis
ce tour mathématique et il l’a fait pour Hunab Ku.
JOSÉ ARGÜELLES
José Argüelles est l’inventeur du
synchronomètre, c’est-à-dire un Haab, ou calendrier des 13 Lunes, synchronisé
sur le rythme sacré 13*20, le Tzolkin. Cet homme est un drôle de bonhomme (d’ailleurs, il est né le même jour que ma
fille, un 24 janvier, c’est dire). Il se considérait comme un avatar de Pakal Votan, pour un prophète de la
pensée galactique maya, il a fait de nombreuses recherches et en a rendu compte
dans une longue bibliographie (extrait en fin d'article). Celleux qui lisent ses livres disent
« C’est génial mais il va beaucoup trop loin. » et c’est vrai, il va
au bout du cosmos. Il a prophétisé l’insurrection zapatiste de 1994, mais
surtout, c’est lui qui a parlé du 21 décembre 2012 (qui est juste la fin d’un
baktun et de leur compte long en fait). Il est mort avant, en mars 2011,
mais non sans avoir propagé sa pensée sur toute la surface de la Terre. Selon
lui, notre organisation sociale du temps est toxique, reflet de l’inclinaison
matérialiste de l’humanité : c’est Babylone. Le calendrier maya, à
l’inverse, est stable : il
est régulier et sans accroc tout en invitant chaque individu à considérer la
place qu’il occupe sur terre et à se soumettre à des rythmes d’une plus grande
pureté, plus naturels.
HUNAB
KU
Du coup c'est là qu'on va se séparer des Mayas, les amies. Ce n'était pas exactement des tendres et de toute évidence, leur spiritualité ne leur a pas permis de devenir plus sages... Peut-être que s'ils avaient rencontrés Argüelles, ils n'en seraient pas arrivés là... La logique violente de la société maya parait incompatible avec la lecture qu'en fait cet homme ; alors on ne va pas réveiller les morts, je vais me contenter de te dire qu'à partir d'ici, on nage dans la vision d'Argüelles (je ne m'éloigne pas du bord, promis).
Selon lui, l’univers est comme une
grande construction géométrico-mathématique. Les Mayas avaient des dieux mais
au-dessus de ces dieux, qui ne sont eux-mêmes que des manifestations très
terrestres, Argüelles voit une Logique Supérieure : Hunab Ku, qui est le Grand
Architecte, quoi (en fait un terme post-colonial pour désigner (imposer) le dieu chrétien). L’univers est son corps et Hunab Ku est le cœur de ce corps,
au centre de lui. Ce corps céleste, l’Univers, a des articulations, comme les
nôtres un peu, dans lesquelles transite le flux d’Hunab Ku. Ces articulations,
ce sont les étoiles, pour nous le Soleil. Et la preuve qu’Hunab Ku est dans le
Soleil, c’est que la vie pousse à la surface de la Terre. Logiquement, nous
sommes des êtres faisant partie d’Hunab Ku. Parce que dans chacun de ses rayons
transite sa volonté de construire le monde, avec le code mathématique qui va
bien dedans pour que ça se réalise, chaque jour. Tu visualises ? Ses
rayons sont comme un brin d’ADN : il informe
tout ce qu’il touche.
Hunab Ku dessiné par Argüelles |
Ce flux d’Hunab Ku, c’est une pulsation,
et je te demande laquelle ? La pulsation 13*20 bien sûr !! Alors
voilà, en te connectant au 13*20, tu te mets en phase avec Hunab Ku, c’est
tout ! Chaque jour, l’Univers produit une
« note » différente, avec plein d’informations dedans, la pulsation
change à minuit chaque jour : c’est le but du synchronomètre de te dire,
chaque jour, quel jour on est pour Hunab Ku. C’est la couleur du monde du jour,
sa SIGNATURE. Chaque jour est ainsi une petite porte par laquelle tu fais
rentrer le reste de l’Univers dans ta vie.
Oui, c’est super mystique, je kiffe à
mort, c’est la cosmogonie la plus cohérente que je connaisse (et dieu sait
comme je l’ai cherché). L’un des principes de base de cette spiritualité est
information = énergie. Je ne sais pas si tu as remarqué comme c’est vrai dans
la vie ? Savoir c'est pouvoir, ce qui fait de nos convictions une sorte de carburant. Pour faire simple si on ne veut pas avoir à remettre en cause
toutes ses valeurs scientifiques ou religieuses, c’est de simplement
considérer qu’Hunab Ku c’est le monde. Le monde est fait de 20 ingrédients
mélangés de 13 manières différentes. Tous les matins : cookie !
Et c’est José Argüelles qui te donne la
recette !
À son synchronomètre, Argüelles a ajouté
tout un tas de jeux et de tables de lecture du temps basés sur d’autres
recherches, sur le yoga, le Coran ou les runes antiques. Un vrai Maya le gars,
en plein délire cosmique. Je t’avoue qu’en lisant ces bouquins, on s’amuse pas
mal. Tu peux t’enfoncer autant que tu veux dans son
délire, je ne connais pas d’effets secondaires néfastes : ce n’est pas une
secte, ce n’est pas un mode de pensée nouveau ou radical, c’est un peu comme
dans la Bible tu vois, tu peux comprendre le message « Aimez-vous les uns
les autres » (c’est l’exact propos d’Argüelles) sans croire que Jésus a
marché sur l’eau. C'est le must have du New Age ! Bref : rigueur mathématiques et amour de soi et de son
prochain sont les mamelles du Tzolkin selon Argüelles. Pour lui (toxicomane et alcoolique au long cours), tu es sur
Terre pour marcher, progresser et t’améliorer chaque jour. Le Tzolkin fournit
un canevas de recherche, une lecture des jours. Toustes les humaines
suivent le même Tzolkin, illes sont pour ainsi dire tissées avec le même fil du
temps, illes partagent une histoire commune. Mais chaque humaine possède aussi
dans ce calendrier son propre calendrier. Il offre ainsi deux niveaux de
lecture : une lecture de TA vie et une lecture de l’Humanité (et
donc de ta place dans celle-ci).
Synchronomètre 2017-2018 |
… en suivant les articles à venir :
en maîtrisant les quelques outils nécessaires, tu peux calculer toi-même tous
les oracles du Tzolkin.
… en fréquentant l’un des nombreux sites
qui se proposent de délivrer quotidiennement « l’enchantement du
rêve », c’est-à-dire l’oracle du jour / de l’onde / de la lune en cours,
comme Mainbleuecosmique.
… en téléchargeant le logiciel Dreamspell, qui fait le même boulot mais directement sur
le bureau de ton ordinateur.
Personnellement, j’utilise le
synchronomètre, un cahier de 192 pages à gros carreaux, un feutre noir, un
stylo bille, un crayon de papier et des crayons de couleur (rouge, bleu et
jaune). Et c'est devenu mon journal quotidien.
Demain, je t’explique les bases du
fonctionnement de ce calendrier. Allez, je t’offrirai des chemins, des oracles
et des châteaux ! Et après-demain,
tu pourras gambader personnellement sur les routes du Tzolkin : je te
donnerai une couleur, un but et un défi !
***
Brève bibliographie de José Argüelles
(à
lire pour creuser… des extraits au bout des liens)
- Le facteur maya, la voie par-delà la
technologie, éditions Ariane (2010)
- Chroniques de l’histoire cosmique :
Tome
1 : Livre du trône et des Origines
Wahooo ! Je te remercie tellement pour ce travail que tu partages ! Est-ce que aujourd'hui encore tu utilises ce calendrier ?
RépondreSupprimerUne pépite ! J'aime te lire.
RépondreSupprimerMerci pour ce partage
Une pépite ! J'aime te lire. Merci pour le partage.
RépondreSupprimerBonjour Bastien, merci pour ton merci !
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