Sarah Bernhardt (première)


Sarah Bernhardt par Nadar, 1860



J’ai réellement découvert Sarah Bernhardt il y a quelques jours, avant de me rendre compte que c’était Stéphane Bern qui me la présentait. Mais c’était trop tard ! J’ai regardé jusqu’au bout.

Je ne connaissais rien d’elle. Je vais partir du principe que vous non plus, et vous présenter cet incroyable personnage.



Sarah (de son vrai nom Henriette Rosine Bernard) naît le 25 septembre 1844 de père inconnu mais peut-être pas tout à fait obscur non plus. Et pour cause : sa mère est une demi-mondaine hollandaise d’origine juive, une courtisane, une femme entretenue qui « rendit heureux » quelques artistes, écrivains et hommes politiques à la notoriété avérée.

Lorsque sa mère choisit de vivre sous les lumières de la vie parisienne, Sarah reste auprès d’une nourrice, en Bretagne. Le duc de Morny, amant de sa mère paie ensuite son éducation, en institution, puis son entrée dans un couvent de Versailles. Elle y reçoit le baptême chrétien et y joue son premier rôle au théâtre : un ange. Elle envisage même de devenir nonne, mais sa mère aimerait en faire comme elle une riche courtisane. Mais Sarah la désespère : elle ne la trouve pas vraiment jolie, et de caractère trop trempé. Ça va être dur de la caser. Le duc de Morny propose d’en faire une artiste.

De toute façon, Sarah ne veut pas être entretenue. Elle ne veut dépendre de personne, et briller pour elle-même. Elle décide donc d’être actrice, et pas n’importe laquelle, la plus grande, la meilleure, la plus belle, la plus riche. La plus grande du monde. Elle a alors pour devise, parmi d’autres mots bien sentis qu’elle a laissés à la postérité :

« Quand même »

À quatorze ans, sans avoir jamais été sérieusement préparée, elle passe le concours du Conservatoire d’Art dramatique de Paris (en déclamant Les deux pigeons de Jean de la Fontaine !), qui la reçoit en 1859. Elle en ressort en 1862 avec un second prix, pour entrer à la Comédie Française. Son caractère de chien se confirme : après maints heurts, elle en est exclue quatre ans plus tard pour avoir gifler une tragédienne qui avait bousculé sa sœur (qui avait marché sur sa traîne). Elle est alors engagée par l’Odéon, où elle se révèle dans Le Passant de François Coppée puis Ruy-Blas. La Comédie Française la rappelle.

Dès cette époque, Sarah se distingue comme une femme d’autorité, courageuse, et patriote. Ainsi en 1870, Paris est assiégé, et elle transforme le théâtre en hôpital militaire où elle soignera le (futur) maréchal Joffre. C’est une hyperactive consommée, apprenant la sculpture, le modelage, la peinture, l’escrime, sortant la nuit, travaillant le jour (ou inversement).

Affiche de la Dame aux Camélias
par Alfons Mucha
Elle met au monde en 1864 son unique enfant, Maurice, qu’elle chérit au-delà de toute mesure, ce qui lui sera souvent reproché. Le père est un noble belge, Eugène François Charles Lamoral, prince de Ligne. Elle multipliera ensuite les amants et les passions, parmi les acteurs (Mounet-Sully, Lucien Guitry), artistes de tous poils (Gustave Doré, Georges Jules Victor Clairin, Louise Abbéma, Victor Hugo), hommes politiques et députés (Léon Gambetta, Henri Ducasse, le Comte de Rémusat et peut-être même le prince de Galles) qu’elle sera amenée à côtoyer. Elle s’entichera tout particulièrement d’un beau mondain très populaire, croisé chez Maxim’s, Charles Haas, jaloux et coureur, et qui ne lui rendra jamais l’amour qu’elle lui voue. Elle se mariera même en 1882 à Aristide Damalas, toxicomane qui la laissera veuve à la suite d’une overdose en 1889.

Sarah, si elle multiplie les conquêtes (mais c’est plutôt elle la conquête, j’imagine, dans la tête de la plupart de celles-ci), multiplie avant tout les rôles, qui lui apporteront une gloire sans commune mesure chez ses contemporains, ce qui lui vaut aujourd’hui le titre de « premier monstre sacré » (mots de Cocteau, inventés pour l’occasion). Elle donnera, au cours de sa carrière, quelques 120 représentations de dizaines de pièces, parmi  lesquelles Phèdrela Dame aux Caméliasl’Aiglon, Salomé, Hamlet, Cléopâtre… Ses caprices, ses scandales, ses esclandres la font connaître aussi bien que les rôles qu’elle endosse et son directeur peine à contenir une telle personnalité.

Claquant finalement la porte de la Comédie Française, elle devient une artiste indépendante en fondant sa propre compagnie en  1880, avant de partir en tournée à l’étranger. C’est la première actrice (et même le premier acteur) à se produire sur les cinq continents, jusqu’en Australie, jusqu’en Russie, jusqu’en Amérique, affrétant son propre train pour trimballer ses 8 tonnes de malles, habits, costumes, meubles, draps et bijoux. Elle obtient même son étoile à Los Angeles, sur le Hollywood Walk of Frame. Son phrasé, son emphase font toujours un tabac, quand bien même elle ne joue qu’en français devant une salle qui n’en comprend pas un mot.

Elle prend par la suite la direction du Théâtre de la Renaissance, puis du Théâtre des Nations, qu’elle rebaptise à son nom, en 1889.

Elle a alors atteint les espoirs qu’elle caressait jeune fille : elle est la plus grande actrice du monde. C’est également à ce moment-là que se développe la maladie qui a emporté sa sœur Régina en 1874, et qui la laissera elle-même bientôt infirme.


Sarah par Napoléon Sarony, 1891


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