Pandora

Je vous présente Pandora.

La vraie, ni bleue ni luisante. Je ne suis pas historienne, ni peintre, ni croyante, par contre, j’ai eu un long dada : l’histoire des religions. J’avoue que ma pauvre passoire de tête en a délesté un max, mais il m’en reste le plaisir…

Les religions antiques sont particulièrement intéressantes, parce que peu embarrassées, encore, par la bienséance et la politesse des mœurs. Disons-le, les mythologies grecquo-latines, c’est du commérage au jus de boyaux. Je ne vais pas vous faire le topo de qui créa quoi avec l’aide de qui, qui coucha avec qui et avec quoi, non, ce serait vraiment compliqué, parce qu’ils se la mettent tous, les uns, les autres, en long, en large, et en travers. Souvent, on raconte par épisodes. Comme si c’était fait pour, genre.

Et comme, encore, un fait exprès, ces épisodes nous sont souvent parvenus illustrés par les grands maîtres de la peinture. Vous l'aurez compris : interlude artistique. N’y connaissant pas grand-chose, je vais faire ce que je peux, et de votre côté, aussi. Toute précision apportée sera chaudement accueillie.

Bref. Où l’on se rend compte que l’Homme s’est toujours pris pour un dieu, et où l’on se demande pourquoi.


Eva Prima Pandora
Jean Cousin (1490-1560)
1550
97,5 x 150 cm, huile sur bois


Qui est Pandora ?

Pour savoir qui est Pandora, il faut se figurer Jupiter : le balèze des balèzes, le Dieu des dieux, le boss des bosses. Il fait ce qu’il veut. Au moment qui nous intéresse, il façonne la race humaine. Il y manque une chose : la femme.
Il demande donc à son fils forgeron (Vulcain) de lui bidouiller la créature idoine, susceptible de donner envie aux hommes de se reproduire. La chose étant faite, elle est sobrement (mais élégamment) habillée de blanc, avec un petit voile, une petite couronne d’or (mais lourdement chargée en curiosité grâce à Marraine la Bonne Fée Héra), nommée Pandora (« Qui a tous les dons », alors que l’homme vient justement de se voir très injustement chargé en dons, puisqu’il n’en restait plus à distribuer une fois que les animaux avaient été pourvus…) et hop, expédiée sur Terre.

Là, elle croise Épiméthée (celui qui était, fortuitement, chargé de répartir les dons… et accessoirement le frère de Prométhée), qui ne manque pas d’être le premier amoureux du Monde.

Il l’invite donc chez lui, comme vous et moi l’aurions fait. La nuit se passe…

Et au matin…

Je laisse la parole à Homère (L’Illiade), ça devrait vous rappeler quelque chose… :

Le lendemain matin, Épiméthée sortit.
Pandore resta seule à la maison.
Comme elle était curieuse, elle fouilla la demeure.
Dans une armoire, elle trouva
une boîte fermée, qu’elle ouvrit.
Hélas, c’était la boîte où Prométhée
avait caché les souffrances de l’homme.
Comme un ouragan, la maladie, la vieillesse,
la colère, la jalousie et bien d’autres horreurs
s’échappèrent et se répandirent sur la Terre.

Cette boîte, Pandora a la bonne idée de rapidement la refermer, mais allez, savoir sur quoi… c’est pô facile à traduire, le grec.

Le syncrétisme a rapidement fait son œuvre, en tout cas, et Cousin en fut la victime. Sur ce tableau, on y voit un crâne, l’Homme a donc déjà déchu, la boîte a été ouverte : il s’agit du vase rouge derrière Pandora. Elle est pâle comme une morte, et elle retient de son bras le couvercle d’un vase blanc : celui qui contient le Bien. Pandora, la « Première Ève », a fauté, et semble bien se rendre coupable de non-assistance à humanité en danger. Cousin a d’ailleurs peint un rameau de pommier à sa main, et un serpent à son bras pour que nous ne manquions pas de faire le parallèle. De fait, le plus souvent, il est dit que c’est l’Espoir que Pandora retient dans la boîte. Après, on peut encore se pinailler pour savoir si le fait que l’Espoir soit dans la boîte permet à l’Humanité d’en jouir ou au contraire l’en prive.

Vous perdrez votre temps, car enfin une chose cloche : que foutait, nom d’une pipe, l’Espoir dans la jarre qui contient tous les maux ?!

Pô facile je vous dis. D’autres traducteurs utilisent le mot « Crainte » au lieu «d’Espoir », l’attente de quelque chose…
Ça parait plus logique : cela permet à l’Homme de vivre malgré tout, parce qu’il lui reste l’insouciance, sa lucidité étant bien rangée.

Pandora, d’ailleurs, cette curieuse, telle Boucle d’Or dans la maison des Trois Ours, a été la première à mettre en pratique cette géniale inconséquence qui rend la vie plus belle, qui fait vivre sans trop penser à demain, aimer sans aucunes bornes, avaler des montagnes, déplacer des océans et ouvrir des boîtes.


Quant aux maux… On peut penser, aussi, qu’ouvrir ce genre de boîte, la boîte à Vérité, c’est se permettre d’être autre chose qu’un animal : nous, on a des Soucis. Je suis fière d’avoir des emmerdes, de me poser des questions et de coordonner mes actes aux réponses que j’y apporte. Fière de la croquer, la pomme. Euh, de l'ouvrir, la boîte.

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