Fini -1

J’ai passé la nuit dans un lit vide, comme la plupart des nuits. Je n’aime pas dormir seule. C’est mon mari allant se coucher qui me réveille. On est dimanche, il est 7:00.

Graindorge a toujours refusé de se lever tous les jours à la même heure, « tôt » le matin, il n’est pas un « petit robot ». C’est moi qui le fais, du coup. Il ne s’est pas couché avant parce qu’il est « fatigué ».J’ai sérieusement droit à cette explication depuis des années pour expliquer son refus, également, de se coucher pas trop tard. Du coup, mes occasions de dormir s’impriment en négatif sur les siennes. Pendant des années, j’ai pas su faire, mon lit me jetait sur mes pieds. Aujourd’hui, je dois bien admettre que c’est un peu n’importe quoi. Mais comme je n’ai pas envie que ça tourne au bras de fer, d’ici une ou deux heures, à celui qui mettra la plus mauvaise volonté à aller préparer le petit-déjeuner, je décide de me lever tout de suite.

Je me lève donc, déjà de mauvaise humeur. Je lui bougonne un « merci », il m’engueule : je ne peux pas le laisser vivre, un peu ? C’est vrai, j’étais pas obligée.

Mais les matins, c’est trop souvent ça : il quitte le canapé pour la chambre quand on rentre avec ma fille dans la cuisine, il retourne au salon quand je vais dans la chambre après midi. Entre-temps, nous sommes priées de le « respecter » et de ne pas faire trop de bruit. Pendant la sieste de notre fille, il partira (peut-être) au travail, il rentrera quand elle sera couchée.

Dans le couloir, je passe la main sur le radiateur : froid.

Bordel de dieu.

Le seul avantage qu’il y aurait à ce que l’un de nous se couche à pas d’heure, c’est qu’on pourrait ne pas laisser s’éteindre le feu la nuit. Il fait juste -10 dehors. Ça y est je suis en rogne. J’en suis presque, pourtant, à me féliciter de m’être levée tôt, la chaudière sera plus facile à relancer. Il dit qu’il fait les choses des fois juste pour ne pas se faire engueuler, ben là, il aurait dû.

Alors c’est pas vrai, Graindorge ne fait pas « rien » à la maison et ce n’est pas vraiment parce qu’on l’emmerde qu’il ne vit pas sur nos rythmes... C’est vrai qu’ici, normalement, celle qui devrait se soigner, c’est moi.

C’est juste que… ben… je ne me suis pas mariée pour être une mère célibataire en colocation avec une personne sympathique mais sale et peu arrangeante (même si elle a de bonnes raisons de l’être). L’immatérialité de ses apports fonde une situation floue et complexe sur laquelle est venue se greffer toute la misère du monde (ou alors, ne mettez que mes envies de cul par-dessus, si vous voulez imaginer). Ma fille a eu cinq ans, ça y est, c’est fait, elle n’est plus un « enfant en bas-âge », ça va commencer à être un peu plus simple, mais franchement, ça l’a pas été jusque là. Et je crois que je ne suis pas quelqu’un qui « n’encaisse pas », je suis quelqu’un qui a été atteint, là, dans quelque chose de très, très vif et très, très important. C’est devenu très clair hier matin, au petit-déjeuner.


CHICOREE : Je suppose que Papa est au lit.
VOLU : …
CHICOREE : C’est parce que les papas se lèvent pas à la même heure que les mamans.
VOLU : …


J’ai bien cru que j’allais m’enfoncer le crâne dans le placo.

J’ai toujours voulu éviter ça, je suis une force tendue contre ça depuis 15 ans, et l’on s’étonne, après, que mon mariage bat de l’aile ?

Je ne suis pas TRISTE je suis en COLÈRE !!

J’avais mis ce post là hier, sur le billot… et puis ça m’emmerdait, c’est vrai quoi, ça vous regarde pas… et puis ça m’emmerderait de ne pas le mettre finalement, ça pourrait aider à comprendre :


Voilà, Volu et Graindorge, c’est fini -1. On sait qu’à 0 on perd tous les deux.

Trop de sexe et pas assez de ménage, si vous voulez nos avis respectifs. On pourrait aussi dire trop de bruit et pas assez d’actes. Après l’échec de la diplomatie, après s’être mutuellement massacrés à la machette les grands principes de la vision du couple, nous rompons les relations.

Cela va déjà changer un certain nombre de choses que je ne détaillerais pas ici. En ce qui nous concerne et très prosaïquement, Graindorge va disparaître de ce blog.

Nous ne parvenons pas à renoncer, ni à nous, ni à l’autre, ni à soi, et encore moins aux fruits de nos amours. Du coup, on s’est coupé les bras et les jambes et on se regarde en chien de faïence sur le carrelage de la cuisine enduit d’hémoglobine, à fini -1.


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