MST


Illustrations Keith Haring



Pour Merde chopée on n’SaiT-où. Des fois on sait. Mais des fois, on sait pas.



Avec Graindorge, par exemple, on a fait connaissance avec un papillomavirus qu’on ne se souvient pas avoir invité.


Les papillomavirus, un nom charmant je trouve, sont une vaste, vaste famille. Ils sont nombreux, communs, répandus sur chaque main, ou presque, que vous serrerez aujourd’hui. 95% d’entre nous en transportent, dès lors que vous avez une vie sexuelle. La multiplication des partenaires accentuent vos risques de les croiser mais aussi de les exprimer si vous les portez. Vous n’êtes pas sensé ignorer que la flore féminine n’aime pas, elle, le changement.


Dans des situations particulières (là, personne n’est d’accord), certains s’expriment sous forme de condylomes, ou verrues, qui n’en font un peu qu’à leur tête, mais surtout contagieuses. Ils apparaissent 6 mois à 1 an après la contamination (laps de temps très creux sexuellement chez nous, soit dit en passant). Les porteurs sont, le reste du temps, non contagieux.
Ces virus portent des numéros, sont des centaines, et globalement, on peut en distinguer deux sortes : ceux qui produisent des condylomes, et ceux qui n’en produisent pas. Parmi les premiers, ils ont l’amabilité de se trier par localisation de ladite verrue. Y a ceux qui sont dedans, et ceux qui restent dehors (oui, moi aussi je trouve ça basique comme façon de classifier, pas ma faute, il s’agit de l’explication fournie par nos thérapeutes). Les premiers, en s’enkystant, produisent des cancers du col de l’utérus chez la femme, n’ont pas de conséquences connues de moi chez l’homme. Les autres restent là, au bord de votre gland ou de votre anus, pour lâcher du spore plein tube dès qu’on les effleure.
Cette saloperie se chope sur une cuvette de chiotte ou sur les bancs d’un sauna, comme une verrue plantaire à la piscine…

Bref, l’expression même de la fidélité ce truc. Vous l’avez ? C’est à vie. Mais vous n’êtes contagieux d’une fois.


Donc, c’est passé par nous, difficile de dire depuis quand. Ça fait forcément réfléchir.

Pour moi, ça veut dire vigilance constante, avec spéculum et gant de latex deux fois l’an. Ça veut dire pommade qui vous transforme le train en cul de singe, azote, CO2, laser, que du bonheur. Je rappelle que c’est incurable, tout ça ne fait que disparaître les symptômes, les verrues, avec fort risque de récidive dans l’immédiat (mais plus vraiment au-delà d’un certain délai : il ne s’exprime plus). Donc vigilance pour tout le monde.
Ça implique une certaine forme de communication avec nos partenaires. Tous, sans exception, sont mis au courant (et là, je balaie large). Certaines discussions émergent : prises de sang, analyses sérologiques, précautions particulières, et débats physiologiques d’une intimité perturbante.

Graindorge jette les bras au ciel, les miens ont plutôt tendance à tomber. A priori, les risques sont plus sérieux pour moi. A priori, ce sont pour ses partenaires à lui que ça craint le plus, donc. Comment ne pas attraper ces merdes, avec nous, mais avec n’importe qui d’autre, finalement, dont vous n’avez pas l’analyse sérologique sous les yeux, et si vous n’avez pas de spéculum ?


- L’abstinence. Forcément. Je vous fais même pas la bise, si je suis vraiment honnête, pas sûre de m’être désinfectée la gueule après avoir sucé Graindorge.

- Les précautions draconiennes : récurage préalable, capote, pas de sexe buccal, pas de doigt qui se trimballe où que ce soit, aucune pénétration sans préservatif, caresses limitées au très strict minimum.

- L’ajustement de conscience, qui joue les souples entre les deux précédentes options. Genre : oui, mais pas n’importe comment, pas avec n’importe qui.


Pour l’instant, les traitements sont des échecs. C’était parti, c’est revenu, après près de deux mois…Grrr !!. Graindorge exclut de toute façon les rapports sexuels tant que les verrues seront présentes, ce que je comprends bien. Je comprends toute réaction que l’on peut avoir à cet égard, sauf celle qui consisterait à s’en foutre. Je trouve normal qu’une personne se pensant saine ne veuille pas prendre de risques, mais qu’elle ne se donne pas l’illusion de croire que l’on peut coucher ensemble sans que ce soit le cas… Je trouve normal qu’une personne qui se sait contaminée se contente d’en sourire. Je trouve normale qu’on me demande où j’en suis, dans mes veines, dans mon corps. Vous comprenez donc que j’ai opté pour la troisième option, mine de rien, renvoyant chacun à ses responsabilités dès lors que l’information est passée… Clairement, certaines pratiques sont plus risquées que d’autres.

Nous devons tous agir en connaissance de cause, d’une part en communiquant avec nos partenaires, d’autre part en s’informant soi-même des risques que l’on prend.




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