Je bande encore
Volu
est de retour, vous êtes priés de vous attacher, les menottes sont dans
l’armoire, là. Je n’ai toujours pas de connexion internet, mais mon besoin
d’écrire et de m’ouvrir est devenu plus fort que Numéo. Il y a un cybercafé pas
loin de mon stand de tir, en fait. Ce sera donc une fois par semaine, deux si
je me lance dans le combiné .22. Le dernier message laissé sur ce blog témoigne
de la longue détresse vécue ses dernières années et qui explique mon absence ici.
J’ai fait des erreurs.
J’ai
perdu du temps à concilier l’inconciliable et bien plus encore à chercher
ailleurs que chez moi les raisons de mes échecs.
J’ai
arrêté de manger.
J’ai
arrêté d’arrêter de fumer, puis je m’y suis mise très sérieusement, pour
atteindre un taux constant de tétrahydrocannabinol dans le sang assez
conséquent.
J’ai
arrêté de penser au suicide, persuadée que je ne vivrais pas assez longtemps
pour ça. Et puis, je suis bien trop lâche.
J’ai
arrêté de lire des histoires à ma fille le soir, de lui parler la journée. Je
me suis retrouver dans l’incapacité mentale de m’en occuper.
Faut
savoir dire « j’ai chié ». Pis faut savoir dire « je vais
redresser le tir ».
Bon
pour commencer, les doteurs m’ont dit qu’il valait mieux que je ne travaille
pas, pendant un petit moment… ils m’ont prescrit des pilules parce que je
marchais pas droit en arrivant aux urgences, on m’a promis que mes cheveux
repousseraient et on m’a laissé ressortir. Gros vide.
Ensuite,
j’ai attendu, pour voir ce qui se passait, j’étais paumée, j’avais pas encore
la moindre idée de ce que j’avais à faire. Il s’est passé que j’ai écrit. 400
pages de tripes et de boyaux, sans me poser de questions. Ça a hérissé les
cheveux de mon psy, j’ai pensé « bingo », t’as mis le doigt dedans,
Volu. Good boy… C’était effrayant, ce que j’avais trouvé en moi, à me demander
sérieusement ce que ça y foutait.
Après,
j’ai arrêté d’écrire, j’y voyais un peu plus clair, je me suis dit alors qu’il
fallait que je me soigne, et que je soigne ma vie. J’ai pris, un, deux, trois
thérapeutes pour compenser, j’ai chargé mes joints encore plus, il s’agissait
de passer à l’acte.
J’ai
sorti la tondeuse, celle qui nous sert à nous mettre au carré quand on
libertine, et je me suis rasé la boule. Je vous assure que ça s’imposait, c’est
moche une pelade. Oui, on m’a déjà appelée Britney. Non, je ne l’ai pas mal
pris, mais celui qui l’a dit a quand même eu ce qu’il méritait : un doigt.
Je
m’attarderai sur cette chose peu commune et très troublante pour une femme
qu’est la perte pathologique de ses cheveux. Par poignées. Par plaques. Par
centaines, chaque jour, dans vos mains. Vous vous transformez en chien râpé,
doucement mais sûrement. Vous essayer le foulard, la casquette, puis les deux.
La perruque, peut-être même. Arrêtons le massacre : rasons. Ça m’a sauvé
la mise. J’ai accédé, mine de rien à une autre image de moi.
Ça
me donne un air voyou, canaille. Ça met en valeur ma nuque, fine et longue, et
mon visage tout entier. Avec mes lunettes et mon mini-short, je les fais tous
craquer, savez…
Ça
me donne un air sage aussi, pur, joyeux. Un petit moine, paraît-il.
Ça
y est, je suis donc ce que j’ai toujours cru que je ne pourrai jamais
être : Sainte Catin.
Le
cul. Vous l’aviez compris, j’ai pas écrit un recueil de chansons pour les
enfants. Nan, je cracherai rien, nix, nada, queude, par contre commencer à
économiser parce qu’il faudra aller l’acquérir légalement quand il sera publié,
et ça va raquer, ce serait pas bête. C’est donc du cul. De l’aventure
aussi !!! Par contre, attention, c’est une malade mentale qui l’a écrit.
C’est une histoire de fille.
Je
ne me suis autorisée aucune censure. Ça a été du pur jus de boyaux de la tête,
j’ai mouillé sans discontinuer pendant trois mois, la chatte tuméfiée à faire
des auréoles sur les draps (j’écrivais dans mon lit). Alors, quand j’ai arrêté…
ouhla, ouhla, ouhla !
Je
suis partie en chasse, j’avais envie de… je sais pas encore dire. Incapable de
concevoir moi-même ce que je faisais, je jure l’avoir fait à l’insu de mon
plein gré. Mais je l’ai fait. Trois fois, trois gars choisis, trois « échecs ».
Graindorge a tiqué, fort. On a cassé des meubles et des assiettes, il a même
déchiré un annuaire en deux rien qu’avec les mains, houba !
Et
puis la tempête est retombée, parce qu’il n’y avait rien à faire d’autre. On
n’allait pas s’entretuer, on s’aime. On a voulu arrêter de crier, et rester ce
que nous sommes, des gens raisonnables, qui se respectent. Il m’a écoutée, je
l’ai écouté. On a parlé, parlé. On s’est dit plusieurs fois que ça devait
servir à rien, de déblatérer comme ça, on tournait en rond ! Mais après
des jours, des semaines, on à vu que chaque jour, chaque semaine, le centre de
gravité, l’enjeu, se déplaçait doucement, les mots s’affinaient, les situations
devenaient plus claires. Les rancœurs s’apaisaient, les craintes s’éloignaient.
Surtout, le temps passaient, les choses se réalisaient, ou pas. Et on y est déjà
un peu arrivé.
Techniquement,
je veux pouvoir faire ce que je veux de mon cul. Ma sexualité m’épate,
m’éclate, me bluffe. J’aime « trop » ça. Je sais, je remets sur
l’ouvrage un truc éculé… « Chéri, je peux aller voir ailleurs ? »
Et en face j’ai eu droit à l’universelle réponse : « non ».
Y
a pas deux têtes qui fonctionnent comme la mienne, y a que la mienne. Et j’ai
décidé, pour d’autres raisons que le cul, que je me tordrais plus en douze
morceaux. Je suis toute entière une et indivisible.
Par
contre, y a pas deux mecs comme celui qui partage ma vie. Le mariage n’a pas
grand-chose à voir, finalement, dès que l’on se met en couple, on s’engage à
réserver sa sexualité à son partenaire officiel. C’est même plus important que
tous les autres engagements moraux qu’il met sur la table en même temps. C’est
peut-être ce qui me gave le plus. Parce qu’en m’imaginant que mon mari me
devait aide et assistance au-delà de ce qu’il EST, je me suis bien fourvoyé,
j’ai mal aux yeux d’y avoir fourré mes doigts jusqu’aux coudes et j’ai plus de
cheveux, alors je m’excuse mais pardon. L’égoïsme dont vous pouvez taxer une
telle attitude n’est rien moins que la première méthode de survie la plus
utilisée. Il aime ne pas avoir à nettoyer les sols. J’aime baiser. Je suis un
individu. Marginal en plus, ma notion de la communauté est sérieusement
entamée, je peux bien le dire.
C’est
justement pour ça que j’y vais. Bizarrement, le cul est le seul domaine où je
suis raccord avec le reste de l’humanité, s’il faut le dire comme ça, je le
dis ! Je me soigne, comme je le répète. Là, je suis bien avec l’autre. Je
suis un bonobo. Ça me tient un peu lieu de mode de communication.
Je
pense être sincère dans ma démarche : je ne veux pas faire du sexe mon
mode de relation au monde. Je veux apprendre tout le reste. Je veux aussi
apprendre à me soumettre au groupe et aux règles, mais je suis bien décidée à
faire la part des choses. Il y a des choses en moi que je veux laisser vivre,
j’en ai besoin.
C’est
pas juste un besoin physiologique, c’est aussi une faille dans ma vie. Parce
que dans le sexe, il y a des choses en jeu qui sont au cœur de ma vie : ma
relation aux hommes, à la violence et à la vérité, la notion d’identité
sexuelle au sens large est aussi prégnante (j’ai pas été une fille pendant un
looooong moment). Bref, j’ai du boulot, je sors mes outils, voilà tout.
Le
chemin fait est déjà immense ! Je pense m’avoir pardonné d’avoir si
longtemps détesté les hommes.
Il
existe des hommes intelligents, fins, agréables, avec qui la conversation est
un délice. D’autres, un peu plus bourrus peut-être, mais pas plus cons, qui
vous bottent allégrement le train en vous demandant de vous rhabiller. Quand
vous les rencontrez, vous comprenez que gars et nana ont autre chose à faire
ensemble que se chamailler.
Il
en existe de parfaitement machistes, crasses et/ou cons, avec qui je partage,
chaque semaine, le pas de tir de mon canton. C’est thérapeutique et en
l’occurrence, salutaire. Je vide des chargeurs de .38 en écoutant des blagues
sur les flics et en buvant de l’Ice Tea (eux de la bière), et ça me va très
bien. On est pas mal à les écouter d’une oreille distraite, parce que les plus
nombreux sont des gens comme vous et moi. Pis comme j’aligne hausse et guidon
comme je respire, je te me les rends sages, sages…
Je
tire donc. Je cours aussi. Je fais des pompes. Je mange du soleil.
Encore
mieux : je travaille. Avec mes mains, je veux dire, pas qu’avec ma tête
comme j’ai presque toujours fait. L’immense besoin de me rendre utile, de
rentrer par le travail en relation avec mes proches, s’est fait grandement
ressentir. Alors j’ai mis mes bottes, ma casquette kaki, mon plus vieux
pantalon, et je suis allé faire la paysanne.
J’avais
toujours dit, non, jamais, je ne boirais pas de cette eau. Sentir la merde et
suer du son jusque dans les trous de nez, non merci. Pis, chacun son boulot, le
paysan, c’est pas moi.
J’ai
fait, moi aussi, un pas vers lui. Je pue pareil quand je rentre le soir,
maintenant, et je produis des crottes de nez à la luzerne.
Ouvrez
grand les écoutilles, je le répéterai pas deux fois : de 17h à 19h (à peu
près, plus tard si les râteliers se sont cassé la gueule), le samedi et le
dimanche, Volu entretient le gîte d’une soixantaine d’ovins, autrement nommés
« moutons ». Ça pue, c’est très largement con et ça bouffe du foin
(tout s’explique, le cerveau a un effroyable besoin de protéines, je suppose).
Par contre, c’est très gentil, même quand ça a faim. Ça fait plus que mon
poids, donc pas grand-chose non plus, même moi je peux en déplacer un (grâce à
mon entraînement de pointe) ! Allez, j’adore quand ce blog prend un tour
champêtre, je vous expliquerai la semaine prochaine, parce que j’en suis fière,
je vous dirai pourquoi, aussi...
Mais
revenons à nos moutons. Euh… je veux m’endurcir à la violence donc, à m’adapter
face à elle, et à celle qui est indéniablement sortie de moi. Je n’explique pas
cette explosion de stupre et de clash, dans ma tête, sinon par des hypothèses.
Tout d’abord, je vais avoir trente ans. Vous savez, les hormones, tout ça… Et
puis, le poids des frustrations, le passif, les choses que je traînais déjà en
commençant ces six longues dernières années épuisantes, et c’est sorti à la
faveur de mon burn out. Je vois pas, autrement.
La sexualité de mon couple est largement satisfaisante… Nous baisons, avec Graindorge, avec toujours autant de fougue et d’envie, nous sommes plus que jamais amoureux l’un de l’autre. Nous sommes libertins, échangistes, nous rencontrons assez peu, mais assez bien… Mais j’ai voulu voler toute seule. Construire ma propre relation intime avec d’autres personnes. C’est une immense partie de moi, depuis toujours. Ce que j’y trouve sur moi m’apporte de la paix.
Je
n’ai pas d’autre choix que d’attendre Graindorge, d’attendre qu’il y soit prêt,
mes besoins d’harmonie ne sont pas compatibles avec une guerre civile
permanente.
Je
ne suis pas morte. Je bande encore.
Commentaires
Enregistrer un commentaire