(MOOC) Violences faites aux femmes / Prise en charge des femmes victimes de violences





Le MOOC fait pour terminer un tour d’horizon de la manière dont notre société « prend en charge » les femmes victimes de violences. Alors, il parait que le viol est un crime odieux, il parait que frapper une femme est la chose la plus basse que puisse faire un homme d’honneur, c’est à se demander comment une idéologie aussi bien élevée que le patriarcat, qui aime tant les femmes nesspa, en arrive à en tuer autant et à la dégrader à ce point chaque jour. Et à les protéger si mal, si parcimonieusement. On sait déjà qu’elles s’exposent à la vindicte populaire, au slutshaming, aux accusations de calomnies et de mensonges… Toutefois un petit coin de loi permet aussi de les protéger. La reconnaissance du phénomène est balbutiante (pourtant les rapports s’empilent) et c’est un parcours de la combattante, en vrai, de demander justice.


Les infos à retenir

- 213 000 femmes sont victimes de violences au sein du couple chaque année.

- 68 000 femmes déclarent un viol au cours de l’année écoulée. C’est un viol toutes les deux minutes.

- La procédure judiciaire, quelle que soit l’infraction, délictuelle ou criminelle, est à peu près la suivante :

1) la police / gendarmerie vous auditionne.

2) une unité médicale judiciaire vous observe, constate l’infraction et fixe la durée de l’ITT (qui sera le reflet de la gravité et du préjudice causé par les violences, et qui, par conséquent, permettra de qualifier l’infraction, soit de délit, soit de crime).

3) le dossier est transmis au procureur de la république, qui va décider du traitement (ou non) de l’infraction commise (principe d’opportunité des poursuites… qui peuvent donc être jugées inopportunes), c’est-à-dire soit d’ouvrir une information judiciaire = saisir un juge d’instruction responsable de l’enquête pénale et de son instruction pour les infractions les plus graves (crimes), soit de poursuivre l’agresseur devant un tribunal correctionnel (qualification en délit). Dans ce dernier cas (le plus courant), le procureur de la république peut demander la comparution immédiate de l’agresseur après sa garde à vue si les faits ont été clairement établis et qu’il ne parait pas nécessaire de poursuivre l’investigation. Le procureur peut également saisir le juge des libertés et de la détention, qui peut décider de placer l’agresseur sous contrôle judiciaire jusqu’à sa comparution devant le tribunal correctionnel.

Prise en charge médicale et psychologique

- Une femme victime de violences sera dirigée vers une UMJ (unité médico-judiciaire) qui réalisera les examens médico-légaux. Elle sera observée par un médecin légiste qui établit un certificat médical et fixe la durée d’ITT (Interruption Totale de Travail, rien à voir avec le fait que vous travailliez ou pas) et ensuite seulement elle sera soignée : elle rencontrera des infirmières, des assistantes sociales, des psychologues et sera mise en contact avec des associations susceptibles de l’aider (interroge-toi sur le genre des noms de cette phrase steuplé).

- Clairement, on ne sait pas comment soigner ce genre de traumatismes psychologiques. Ça demande beaucoup de temps et de travail sur soi. Vous pouvez chercher un bon psychiatre, tenir la dépression à distance avec des antidépresseurs (anxiolytiques déconseillés), tester l’EMDR, l’hypnose (peu efficace sur les agressions sexuelles), et les groupes de paroles, mais évitez absolument… les thérapies familiales.

- La victime n’est pas la seule à être examinée : l’auteur des violences sera lui aussi confronté à un examen et peut être l’objet d’une injonction de soin et/ou d’une mesure d’éloignement s’il apparaît qu’il continuera à représenter une menace pour la victime.

Prise en charge par la gendarmerie / police et la justice

- Le Brigadier AUBERGER, responsable de la formation des Brigades départementales de protection de la famille (!) nous livre quelques éclairantes précisions sur l’accueil des femmes victimes de violences.


« La nature de cet accueil, qui fait de celui qui en est chargé un observateur privilégié de la vie sociale, doit permettre de mettre en œuvre des procédures d’alertes susceptibles de prévenir et de dissuader les violences. »

Tu te dis « Cool, quelles sont ces mesures pour prévenir les violences ? »

Attends, attends, ça vient !

« Selon la situation, différentes approches sont possibles. La première chose, c’est de commencer par évaluer la situation et adapter notre intervention. Séparée l’auteur et sa victime et éventuellement mettre cette dernière à l’abri. Lors d’une intervention à domicile, envisager le cas échéant des mesures de relogement de la victime et éventuellement des enfants. Dans cet optique, elle doit, en quittant le domicile prendre tous les effets importants : papiers officiels, comme la carte d’identité, la carte vitale, les chéquiers, les diplômes, les contrats, le carnet de santé des enfants, les éléments attestant de violences, comme les certificats médicaux antérieurs, les attestations de mains courante, les plaintes antérieures. Et bien entendu ses effets personnels et ceux de ses enfants. »

Ah oui, parce que tu sais, déserter le domicile familial est toujours considéré comme une faute, alors si tu le fais, fais-le bien ! Bref, la police vous conseille de fuir comme une voleuse, c’est tout. Il ne semble pas y avoir de protocole particulier pour gérer l’agresseur. Assurez-vous que l’on vous posera, à vous, beaucoup de questions (si on veut bien enregistrer votre plainte).

« En tout état de cause, la prise en compte de la victime doit être immédiate, même si c’est la vingtième plainte de la journée, car c’est souvent sa vie entière qui est bouleversée. Il est bon de rappeler l’obligation d’enregistrer une plainte, quel que soit le lieu de commission des faits, à charge de transmettre au service territorialement compétent, le cas échéant, en passant par le procureur de la république. Un certificat médical n’est pas un préalable à un dépôt de plainte. »
« Aujourd’hui les policiers doivent s’inspirer d’un protocole de recueil de la plainte pour une victime de violence conjugale. Elle ne doit pas consister à reproduire les déclarations spontanées de la victime, l’enquêteur a un rôle actif et doit poser des questions de manière à évaluer la gravité des faits et surtout la dangerosité de l’auteur. »

Tu sens comme elle est dissuadée la violence, là ? Tu la sens la prévention ? Moi non plus. Et si vous n’avez pas encore fui et bien… on vous briefera pour pouvoir le faire plus tard.

« À l’issue de son audition, si la victime désire réintégrer son logement, il convient d’évaluer avec elle les risques encourus du fait de la présence ou du retour possible du partenaire violent au domicile. La victime peut vouloir seulement récupérer des affaires personnelles ou des papiers. Si les circonstances l’y obligent, par mesure de sécurité et de protection des victimes, il convient de l’accompagner au domicile le temps de cette démarche. Si la victime décide de retourner à son domicile, en vue de cohabiter de nouveau avec l’auteur des violences conjugales, il faudra alors lui proposer le scénario de protection. Il s’agit d’une liste de recommandation pour parer à un éventuel départ en urgence. On pourra alors lui proposer par exemple de mettre en sécurité des numéros de téléphone ou de les apprendre par cœur, de mettre en lieu sûr des documents indispensables à un éventuel départ en urgence, tels que les avis d’imposition, des fiches de paie, des moyens de paiement, de contacter le cas échéant des personnes sur lesquelles elle peut compter et de convenir avec elle d’un code de communication bien particulier qui permettra éventuellement à ces personnes dignes de confiance de prévenir les services de police. »

Merci Brigadier ! La chose la plus intéressante que l’on vous donnera dans un service de police ou de gendarmerie, ce sont les brochures d’associations d’aide aux victimes.

- Le Code Civil permet aux femmes victimes de violences de solliciter une ordonnance de protection au Juge aux Affaire Familiales. Voici comment l’on s’y prend en France, lorsqu’on veut « protéger une femme » :


« DES MESURES DE PROTECTION
DES VICTIMES DE VIOLENCES


« Art. 515-9.-Lorsque les violences exercées au sein du couple ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin mettent en danger la personne qui en est victime, un ou plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence à cette dernière une ordonnance de protection.

« Art. 515-10.-L'ordonnance de protection est délivrée par le juge, saisi par la personne en danger, si besoin assistée, ou, avec l'accord de celle-ci, par le ministère public.
« Dès la réception de la demande d'ordonnance de protection, le juge convoque, par tous moyens adaptés, pour une audition, la partie demanderesse et la partie défenderesse, assistées, le cas échéant, d'un avocat, ainsi que le ministère public. Ces auditions peuvent avoir lieu séparément. Elles peuvent se tenir en chambre du conseil.

« Art. 515-11.-L'ordonnance de protection est délivrée par le juge aux affaires familiales, s'il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime est exposée.A l'occasion de sa délivrance, le juge aux affaires familiales est compétent pour :
« 1° Interdire à la partie défenderesse de recevoir ou de rencontrer certaines personnes spécialement désignées par le juge aux affaires familiales, ainsi que d'entrer en relation avec elles, de quelque façon que ce soit ;
« 2° Interdire à la partie défenderesse de détenir ou de porter une arme et, le cas échéant, lui ordonner de remettre au greffe contre récépissé les armes dont elle est détentrice ;
« 3° Statuer sur la résidence séparée des époux en précisant lequel des deux continuera à résider dans le logement conjugal et sur les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement. Sauf circonstances particulières, la jouissance de ce logement est attribuée au conjoint qui n'est pas l'auteur des violences ;
« 4° Attribuer la jouissance du logement ou de la résidence du couple au partenaire ou au concubin qui n'est pas l'auteur des violences et préciser les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement ;
« 5° Se prononcer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et, le cas échéant, sur la contribution aux charges du mariage pour les couples mariés, sur l'aide matérielle au sens de l'article 515-4 pour les partenaires d'un pacte civil de solidarité et sur la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants ;
« 6° Autoriser la partie demanderesse à dissimuler son domicile ou sa résidence et à élire domicile chez l'avocat qui l'assiste ou la représente ou auprès du procureur de la République près le tribunal de grande instance pour toutes les instances civiles dans lesquelles elle est également partie. Si, pour les besoins de l'exécution d'une décision de justice, l'huissier chargé de cette exécution doit avoir connaissance de l'adresse de cette personne, celle-ci lui est communiquée, sans qu'il puisse la révéler à son mandant ;
« 7° Prononcer l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle de la partie demanderesse en application du premier alinéa de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
« Le cas échéant, le juge présente à la partie demanderesse une liste des personnes morales qualifiées susceptibles de l'accompagner pendant toute la durée de l'ordonnance de protection. Il peut, avec son accord, transmettre à la personne morale qualifiée les coordonnées de la partie demanderesse, afin qu'elle la contacte.

« Art. 515-12.-Les mesures mentionnées à l'article 515-11 sont prises pour une durée maximale de quatre mois. Elles peuvent être prolongées au-delà si, durant ce délai, une requête en divorce ou en séparation de corps a été déposée. Le juge aux affaires familiales peut, à tout moment, à la demande du ministère public ou de l'une ou l'autre des parties, ou après avoir fait procéder à toute mesure d'instruction utile, et après avoir invité chacune d'entre elles à s'exprimer, supprimer ou modifier tout ou partie des mesures énoncées dans l'ordonnance de protection, en décider de nouvelles, accorder à la personne défenderesse une dispense temporaire d'observer certaines des obligations qui lui ont été imposées ou rapporter l'ordonnance de protection.

« Art. 515-13.-Une ordonnance de protection peut également être délivrée par le juge à la personne majeure menacée de mariage forcé, dans les conditions fixées à l'article 515-10.
« Le juge est compétent pour prendre les mesures mentionnées aux 1°, 2°, 6° et 7° de l'article 515-11. Il peut également ordonner, à sa demande, l'interdiction temporaire de sortie du territoire de la personne menacée. Cette interdiction de sortie du territoire est inscrite au fichier des personnes recherchées par le procureur de la République. L'article 515-12 est applicable aux mesures prises sur le fondement du présent article. »


- Le Code Pénal est encore plus tendancieux : selon la gravité des faits, les violences seront qualifiées ou bien de délits (les plaintes sont alors jugées devant un tribunal correctionnel) ou bien de crimes (les plaintes sont jugées en cours d’assises), ce qui fait une sacrée différence. Dans la vraie réalité, 90% des viols ne sont suivis d’aucune plainte et les 10% restants sont presque tous déqualifiés en délits (80%) : c’est la correctionnalisation du viol, qui est pourtant un crime.

- Données juridiques nationales, intervention de Me Marie-Hélène MATIOUDAKIS, avocate à la Cour.




Prise en charge sociale et associative

 - Les assistantes sociales peuvent vous aider et vous orienter pour toute demande d’aide (financière et d’hébergement notamment), ils et elles sont dans l’obligation d’intervenir pour empêcher un délit ou un crime, sont soumises au devoir de confidentialité. La protection de l’enfance est leur priorité.

- Le CNIDFF (Centre National d’Information sur le Droit des Femmes et des Familles), c’est 106 associations et 2504 lieux d’informations répartis sur le territoire.

- La Fédération Nationale Solidarité Femmes gère la plate-forme téléphonique du 39 19 (écoute et orientation des victimes, quelle que soit la nature des violences), accueille, héberge et accompagne les femmes victimes de violences au sein du couple.

- Le Collectif Féministe Contre le Viol s’engage dans la dénonciation du viol et de l’inceste et répondent au 0 800 05 95 95.

- LAssociation contre les Violences faites aux Femmes au Travail dispose de juristes spécialisés susceptibles d’informer les victimes et de se porter partie civile à leurs côtés.

- Le Mouvement du NID intervient dans le milieu de la prostitution et aide les femmes prostituées à accéder aux soins et à la justice.

- Femmes pour le dire, femmes pour agir œuvre en faveur des femmes handicapées victimes de violences.

En France, les gendarmes et les policiers ne sont pas correctement formés à la spécificité de ces violences et se rendent régulièrement coupables de mauvais traitement envers les victimes. Les policiers sont majoritairement des hommes, comme les médecins légistes, les procureurs de la république, les juges d’instruction et les juges des libertés… (mais de moins en moins, heureusement) Les poursuites sont souvent abandonnées (90% des cas ne sont pas élucidés !), et celles qui sont traitées finissent très majoritairement au pénal (80%). Bref, ce sera compliqué / aléatoire à toutes les étapes de la procédure. Welcome in patriarchy, où la Justice Faite aux Femmes traine des pieds !

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