Blue Jasmine - Woody Allen (2013)




Jasmine s’appelle en réalité Jeannette. Mais Jeanette, ça fait tellement prolo, qu’elle préfère Jasmine. Elle a rencontré son mari, aujourd’hui suicidé après avoir été jugé pour indélicate utilisation de l’argent des autres, sur les paroles de Blue Moon. Si vous avez oublié les paroles de Blue Moon, le film ne vous aidera pas (mais ce blog si !)

Jasmine les a oubliées, elle aussi.

Et c’est normal, après avoir été retrouvée balbultiante dans la rue, on lui a administré quelques séances de thérapie « Edison », du nom de l’inventeur de l’électricité. Elle a les fils qui se touchent, Jasmine, depuis qu’elle est fauchée.


Nous voyons Jasmine, par flashbacks interposés, avant sa déchéance : belle et coquette, radieuse dans son cocon soyeux de luxe et de piscines à débordement, sur son transat, dans les salles toutes de boiseries douillettes de sa villa, dans des cocktails… Jasmine est la femme entretenue par excellence : elle a quitté ses études d’anthropologie au milieu du dernier trimestre, pour se marier à son financier véreux. Depuis, elle « claque par habitude » tout l’argent qu’il gagne, elle ne veut pas trop savoir comment.

Oh, bien sûr, elle surprend des conversations douteuses, et elle n’est pas bien sûre de ce qu’il fait de ses journées, mais elle s’en fiche, Jasmine. Elle a besoin qu’on lui offre des bijoux et des piscines. Elle n’est pas faite en coton, Jasmine, elle est faite en soie. La soie, ça vit doucement, richement.

Tout au long du film, elle n’aura de cesse de revendiquer cet incontournable état de fait : elle ne mérite que le meilleur. C’est pas qu’elle a du mépris pour les pauvres (allons donc, elle leur donnait de l’argent quand elle en avait !), c’est juste que la pauvreté, c’est pas pour elle.

Ruinée, le souffle court (elle ne peut plus s’offrir de séances de yoga, c’est horrible), elle déboule chez sa sœur, grosso modo caissière chez Prisu (enfin, l’équivalent du coin), qui se fade des « loosers » depuis l’aube des temps. Les cochons étaient bien gardés dans le monde de Jasmine, mais là, tout fout le camp : son rimmel coule et la soie sauvage de ses chemisiers se tâche de sueur au fil de son amère descente sociale.

Les loosers de la sœur n’ont que le mérite d’être pauvres, ils ont tout aussi bien leurs défauts, Woody n’aiment pas les contrastes ! Au moins constatons-nous que les petites gens ont de petits malheurs.

Quoi qu’il en soit… Tout ça, c’est la faute à Jasmine.


Si vous pensez que les femmes sont vénales, allez voir Blue Jasmine.
Si vous pensez que les hommes sont des gros cons, allez voir Blue Jasmine.

Si vous avez besoin d’espoir en l’espèce humaine, allez-y aussi, pour voir la monumentale, stupéfiante, faramineuse (je pèse mes mots) interprétation de Jasmine par Cate Blanchett.

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