Libres ! - Ovidie et Diglee, éditions Delcourt (2017)
Libres ! Ovidie et Diglee |
Alors, d’abord ta gueule j’aimerais préciser une chose : malgré mes effort pour y parvenir, ce blog ne suffirait pas à dénoncer la totalité des horreurs que les hommes font ou ont fait (et feront) subir aux femmes à travers le monde (aka #menaretrash).
Les féministes, on est juste pragmatiques, consciencieuses et ordonnées : on structure notre propos. Parfois on te parle de viols en Syrie et d’autres fois on te parle de harcèlement de rue. Et d’autres fois encore, je te parle d’Ovidie et Diglee, qui s’attaquent spécifiquement aux diktats qui pèsent sur le corps des femmes dans notre société occidentale de petits pères blancs patriarcaux. Il s’agit là des séquelles indubitables de la misogynie (pourtant combattue depuis des décennies) dans notre société démocratique, riche et prospère.
Allez, le menu plus quelques extraits, pour vous convaincre d’acquérir cet ouvrage (en grandes quantités) et de le mettre entre toutes les mains. Le style d’Ovidie est aussi franc que gracile, ça te met bien. En bonus, des VIP et quelques rappels lexicaux-notionnels incontournables pour parfaire ta culture G (attention, les liens sont NSFW - y aura des surpriiiises).
#cumselfie |
« Si les effets étaient si positifs que cela, les hommes, qui ont la pompe à disposition en permanence, s’en feraient des tartines et des masques. […] Sauf que, curieusement, ces mêmes individus qui vantent les bienfaits du sperme ne prennent que très rarement la peine d’avaler le leur, ou d’aller puiser à une autre source masculine. Pourquoi ? Parce que, d’une part, cela ne correspond pas à l’image qu’ils se font de la masculinité et des représentations sexuelles valorisées. Et, d’autre part, soyons honnêtes, cela a un goût de lait périmé dans lequel auraient infusé des asperges. »
There will be blood |
CHAPITRE 4 - Bouge ton boule (ou Le second lieu - avec les seins - où il est permis d’avoir de la graisse, si elle est bien répartie) - Guest-stars : Kim Kardashian, Nicki Minaj et Lou Doillon, mais aussi Iggy Azalea, Beyoncé, Rihanna, Jennifer Lopez, Britney Spears, ElizabethTaylor, Jayne Mansfield, Anita Ekberg, Jane Russell, Sophia Loren, Gina Lollobrigida, Sabrina Salerno… - Termes connexes : booty, twerk, squat, big butt, busty et mères nourricières.
« Pour la sodomie, c’est plus visuel. »
CHAPITRE 5 - I kissed a girl and I liked it (ou Homosexualité masculine vs homosexualité féminine) - Guest-stars : Katy Perry, Kanye West et Freud. - Termes connexes : homosexualité, bisexualité, hétérosexualité et liberté sexuelle.
CHAPITRE 6 - Plus on est de fous plus on rit (ou De la pertinence du couple) - Guest-stars : Beigbeder et Marion Maréchal-Le Pen. - Termes connexes : couple, échangisme, polyamour et sécurité affective.
CHAPITRE 7 - C’est dans les vieux pots… (ou Les ravages du temps) - Guest-stars : la mère d’Ovidie, Françoise Dolto, Nelly Arcan, Lisa Ann et Demi Moore. - Termes connexes : teens, barely legal, MILF, granny et crise de la quarantaine.
CHAPITRE 8 - Le point G, ce mal-aimé (ou Quelques précisions anatomiques) - Guest-Stars : Ernst Gräfenberg, Shere Ite, Annie Sprinkle, Deborah Sundahl, Jon Millward et Anna Span. - Termes connexes : éjaculation féminine, continent noir et obscénité.
« La question de la jouissance vaginale est à l’instar des débats médiévaux sur l’existence d’une âme chez les femmes : des hommes éprouvent le besoin de se concerter afin de déterminer si oui ou non cela existe. On ne cesse de répéter aux femmes que leur sexualité est cérébrale, mystérieuse, impalpable, pour ne pas dire imaginaire.
(…)
Nier la dimension mécanique de l’obtention du plaisir chez les femmes (par la friction du clitoris, par la stimulation du point G, par l’anus ou encore les tétons) c’est renforcer l’idée d’une anatomie féminine inadaptée au plaisir. Si elles jouissent dans leur tête et non dans leur corps, il est aisé de confirmer le vieil adage selon lequel les hommes auraient des besoins là où les femmes se passeraient volontiers de sexe. Ainsi (…) leur principale fonction consisterait à satisfaire les besoins d’un partenaire nécessairement masculin. »
CHAPITRE 9 - La burqa de chair (ou Comment je m’habille ?) - Guest-stars : Nelly Arcan, Manuel Valls et Sophie de Menthon - Termes connexes : burqa, burkini, monokini, voile, photoshop, slutwalk, et tenue adaptée.
Nelly Arcan |
« Même encore aujourd’hui, devenue adulte, je me sens obligée dans un réflexe pavlovien d’adapter ma tenue en fonction des dangers potentiels : je ne prends le métro qu’en chaussures plates (pour pouvoir courir en cas de besoin), je tire sur ma jupe lorsque j’aperçois des groupes d’hommes dans la rue, si je sors le soir je prévois une tenue adaptée en cas de retour seule, je m’habille de manière asexuée (pantalon-chemise) dès que j’ai un rendez-vous officiel de manière à ne pas être perçue à travers le prisme de mon corps… bref, comme beaucoup de femmes, je me camoufle pour avoir la paix. »
CHAPITRE 10 - Gazon maudit - (ou L’incontournable question du poil) - Guest-stars : Stéphane Rose, Pamela Anderson, Jenna Jameson et Lolo Ferrari - Termes connexes : épilation, bimbos et mycoses.
Amber Rose |
« Dans le langage courant, toute pratique anale est systématiquement associée à la dégradation et à l’humiliation : « Espèce d’enculé ! », « Va te faire enculer ! », « Va te faire foutre ! », On se l’est pris profond dans le cul » (ou sa variante quelque peu désuète « Dans l’cul Lulu »), et je vous passe toutes les métaphores politiques autours des quenelles. Ainsi, dans l’inconscient collectif, la sodomie est nécessairement associée à une volonté de dominer, d’asservir, de réduire à néant.
La zézette |
CHAPITRE 13 - Le ciment du couple (ou Cook, clean and suck) - Guest-stars : Naura Hayden, Gaëlle Zimmermann et Élise. - Termes connexes : fellation, suçothérapie et prostitution domestique.
Le zizi |
« Tout le monde ment, et surtout les hommes hétérosexuels. »
CHAPITRE 15 - 50 nuances de conservatisme (ou Le machisme se porte bien, merci) - Guest-stars : E.L. James, Pauline Réage, Georges Bataille, Sade, Emmanuelle Arsan et Camille Emanuelle - Termes connexes : BDSM, paddle, cockring, mommy porn, Pygmalion et salope.
« Ces fantasmes ne se sont pas fondés ex nihilo, ils se nourrissent de constructions sexistes vieilles comme Mathusalem. L’homme se doit d’être fort, expérimenté, et trouve son plaisir dans la domination et l’avilissement de l’Autre. La femme n’a de valeur sexuelle que si elle a « peu servi », si son corps a été peu « partagé », si finalement son corps en tant que territoire et propriété d’autrui n’a pas encore été conquis.
D’où la valorisation dans la société de femmes jeunes et le mépris pour les « salopes », c’est-à-dire celles qui ne considèrent pas leur corps comme une terre souillée par le passage des hommes. »
À travers les différents thèmes abordés, on voit se dessiner une image familière : la femme rêvée de l’homme d’aujourd’hui. Elle est jeune, elle a la taille fine mais le boule aussi développé que ses seins, elle s’épile avec soin les aisselles, les jambes, la chatte et la moustache, elle s’habille de manière à montrer son corps mais elle reste pudique (c’est pas une salope), elle suce ET elle avale, elle essaie avec enthousiasme la sodomie, le saphisme et l’échangisme tout en restant indéfectiblement fidèle (c’est pas une salope), elle cuisine bien, elle tient bien sa maison, et elle lit des romans érotiques à l’eau de rose rances.
Je pense que tu as déjà entendu parler de cette meuf, à défaut de l’avoir croisée en chair et en os. Dans ce portrait la femme est essentiellement l’objet sexuel de l’homme, elle doit se conformer à ses désirs sexuels.
Un trait essentiel de la domination, c’est aussi de ne pas dire son nom et de ne jamais s’afficher comme violente : dans le discours des gens, ce ne sont pas les hommes qui exigent, c’est la femme qui aime naturellement s’épiler et rester mince. Celles qui ne se conforment pas sont jugées anormales, malsaines, sales et foncièrement clivantes, s’excluant elles-mêmes du jeu et méritant d’être méprisées.
Un trait essentiel de la domination, c’est aussi de ne pas dire son nom et de ne jamais s’afficher comme violente : dans le discours des gens, ce ne sont pas les hommes qui exigent, c’est la femme qui aime naturellement s’épiler et rester mince. Celles qui ne se conforment pas sont jugées anormales, malsaines, sales et foncièrement clivantes, s’excluant elles-mêmes du jeu et méritant d’être méprisées.
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