Inception - Christopher Nolan (2010) / Introduction


Dans son film Inception, sorti en 2010, Christopher Nolan a cherché la Grande Complication. Film à grand spectacle, intrigue enchevêtrée, casting qui se la raconte (Di Caprio et Ellen Page dans les rôles principaux), thèmes du rêve et de l’espionnage industriel… de la toute première scène jusqu’au plan final, le spectateur ne sait pas où donner de la tête.

Voilà sa page Wiki.

Je pars du principe que vous avez vu le film, ou que vous ne comptez pas le voir… Dans les cas contraires, lire cet article vous gâchera probablement votre découverte. Vous êtes prévenus !

C’est d’ailleurs sous ce fallacieux prétexte, ne pas gâcher la découverte, que les critiques du film se font quasiment unanimement précautionneuses et timides quand elles ne sont pas élogieuses. Car cette Grande Complication passe pour du génie, ce qui me semble un peu exagéré. Je précise que je me consacre uniquement au scénario, mais c'est déjà beaucoup. Il se trouve que le scénariste n'est autre que Nolan.

J’ai appliqué une grille de lecture simple, la même que celle utilisée pour le film Avatar de James Cameron : composantes, thèmes, structure.


L’INTRODUCTION


Si vous n’avez pas l’esprit en escalier, vous vous plierez difficilement à l’exercice, car les 20 premières minutes sont destinées à vous planter. Le réalisateur est ici plus occupé à nous perdre qu’à nous expliquer, très affairé à nous tromper sur le genre et la tournure que vont prendre les événements.


GENRES 
- JAMES BOND ? Les personnages font une première apparition en costard-cravate, arme au poing. On voit que Cobb a de la ressource (cambriole, tchatche). La dominante du film, ce qui propulse son action, c’est l’infiltration à laquelle vont procéder Cobb et son équipe. Le film emprunte au film de casse ses codes principaux : espions classieux, acrobaties, course contre la montre, chambres-fortes et femme fatale. La nature du casse transforme celui-ci en forme élaborée d’espionnage industriel, et Nolan nous décrit un monde tenu par un capitalisme tout-puissant. C’est d’ailleurs de ce point de vue que le récit prend sa valeur morale : c’est pour empêcher la mainmise de Peter Morrow sur les réserves énergétiques mondiales que Cobb doit se mettre en peine. 
- OCEAN’S ELEVEN ? Pour les énigmes de haute voltige qu’on résout entre hommes, nous serons donc servis, il va falloir jouer de votre muscle cérébral, je vous le souhaite gros et fort. On pourrait dire que c’est un « film de casse psychologique ». 
- JASON BOURNE ? Mettre des tueurs aux trousses du héros, c’est encore le meilleur moyen de le tenir sur les nerfs. A la fin du film, Nolan nous insinue que ça pourrait aussi bien être de la paranoïa, et que les tueurs ne sont peut-être que des projections (c’est Mal, la femme de Cobb, qui le dit). 
- MINORITY REPORT ? En même temps, le contexte est résolument SF : le monde dans lequel les personnages évoluent nous paraît bien actuel, mais la technologie qu’ils utilisent le place tout de même dans le futur. Cette technologie, c’est le « rêve partagé », qui permet à un groupe d’extracteurs de faire effraction dans la tête de leur « sujet » quand il dort, afin de se saisir de ses secrets. 
- LES DENTS DE LA MÈRE ? Le mélange des genres pourrait paraître suffisant, mais l’ambiance du film vire quasiment au thriller, par saupoudrages à partir de la première moitié du film, composante dont se charge Mal, la femme morte de Cobb, qui apparaît comme un fantôme et agit comme un cauchemar tout au long du film. Elle aime tuer et on se demande si elle n’aime pas aussi mourir. Les suicides s’enchaînent comme des petits pains, une de ces grosses ficelles psychologique dont nous gratifie Nolan plus souvent qu’à son tour (la psychologie n’est pas son fort, nous le verrons plus loin).

Le but de Nolan est de nous faire comprendre le problème en même temps qu’il nous le présente, comme dans un rêve. Vous cherchez la loi, le mécanisme, la logique qui relie les événements, car le film n’apportera pas de réponse avant la fin de l’introduction. Celle-ci ne sert qu’à planter le décor et jeter les fils de tension, il va falloir rester vigilants et expectatifs une quinzaine de minutes. L’introduction du film se développe en trois parties :

1) Le début = la fin 
2) Plongée dans le bain : l’extraction dans les rêves de Saito. 
3) Retour à la réalité : le marché avec Saito.

1) Les premières scènes doivent éveiller violemment notre intellect, et pour commencer, nous aurons la fin. Un vieux truc pour donner un air bien ficelé à un scénario. Cobb est retrouvé amoché, complètement paumé, sur une plage possiblement chinoise et traîné jusqu’à un vieillard. Cobb n’a pas l’air de savoir ce qu’il fait là. Vous faites la toupie quelques secondes plus tard : vous êtes dans les même décors, avec les deux mêmes personnages qui semblent poursuivre la même conversation, mais sans leurs blessures ni le passage du temps sur leur visage, en pleine possession de leurs moyens. Vous comprenez donc que vous venez d’être ramenés en arrière, que tout ceci qui va suivre va vous expliquer cela. Les grands thèmes et motifs du film sont lancés dès ces premières secondes : la notion d’idée associée à celle de virus, la toupie, le voyage, le flingue, la mort, les remords, la confusion. Asthéniques s’abstenir.

2) La deuxième partie de l’introduction, qui vous plonge dans les rêves de Saito nous fait chercher les règles du jeu, choix éminemment pédagogique, car nous sommes soumis tout au long du film (avec des pauses !) à une gymnastique cérébrale pas piquée des hannetons, et il serait con de perdre du monde en route. En même temps, Nolan jette les fils de tension « psychologiques » de son histoire.
Pour résumer : Cobb et Arthur se sont infiltrés dans les rêves de Saito, pour lui voler des informations confidentielles (un projet d’expansion économique), que notre héros trouve rapidement dans un coffre-fort. Nous sommes alors dans les appartements privés de Saito. Mais Cobb est en fait piégé par celui-ci, avec l’aide perfide du bras armé de Mal (le rêve s'effondre quand Arthur meurt et de toute façon Cobb n'a trouvé que des feuillets caviardés).
Réveillés par balle ou par effondrement de décor, l'équipe se retrouve avec Saito dans un vieil appartement qui donne sur une rue où semble se dérouler une émeute. On comprend que Cobb redoute la réaction de ses employeurs face à son échec. Vous êtes tendus, comme tout le monde. Saito laisse entendre qu’il s’est laissé endormir (dans tous les sens du terme) pour leur faire passer une sorte d’audition, qu’ils ont ratée. Ils sont donc doublement en échec. Cobb insiste un peu violemment pour avoir les "informations" et Saito se retrouve sur un tapis en polyester qui devrait être de la pure laine - et c'est la meilleure blague du film. Saito se rend compte qu'il rêve encore, et que Cobb est un génie.
Mais l'équipe se taille vite fait, car l'émeute dehors, est maintenant dedans, les rêveurs se réveillent avant Saito, vous vous retrouvez dans un train filant vers Tokyo. Vous avez traversé deux rêves.

Pour arriver à suivre, nous avons bidouillé comme nous avons pu pour comprendre le fonctionnement de cette drôle d’invention qu’est le rêve partagé. Ainsi, à l’issue de cette introduction, vous avez pu comprendre, ou plus probablement vaguement percevoir que :

LA MÉCANIQUE DU RÊVE 1 
- Les personnages rêvent : ils sont endormis et se retrouvent ensemble dans leurs rêves. 
- Il y a plusieurs niveaux de rêves : il peut y avoir un rêve dans un rêve (« rêves emboîtés »). 
- Ces niveaux de rêves « descendent » par rapport au sol qui serait la réalité éveillée. Arthur, le coéquipier de Cobb, se demande « ce qui se passe là-haut » quand ça commence à chauffer dans un autre rêve. 
- Il y a un rêveur qui ne sait pas qu’il rêve et est donc manipulé : le « sujet » (ici, Saito). Les autres savent qu’ils rêvent. 
- On peut voler une idée dans un rêve : c’est une extraction. Cobb se prétend « le meilleur des extracteurs ». 
- On peut se défendre d’une extraction : c’est ce que propose Cobb à Saito, de le rendre invulnérable à ce genre de choses. On comprend ensuite que Saito y était déjà préparé. 
La technologie qui permet de pratiquer ce genre de rêves tient dans une mallette, sous forme d’une drôle de tuyauterie avec des fils que l’on se place aux poignets. 
- Le décor dépend d’un rêveur qui le construit : l’architecte. Ici c’est Nash, qui fait la boulette en mettant un tapis en polyester au lieu d’un tapis pure laine. 
- Mais il n’est pas nécessaire que l’architecte soit dans le rêve : Nash ne se trouve pas dans le second rêve. Il semblerait d’ailleurs, quand Nash précise qu’ils sont dans SON rêve dans le premier, que cela expliquerait que les gens soient agités dans le premier rêve et pas dans le second, où Nash ne se trouve pas. Mais on ne sait pas en quoi ça l’explique. 
- On en déduit que ce n’est pas l’architecte qui « fait » le rêve, mais un autre rêveur : ici, ce serait Arthur qui tient ce rôle, d’après Mal lorsqu’elle voit un tableau étrange au mur.  Finalement, l’architecte ne fait que les plans en amonts. 
- Le rêve s’effondre si le rêveur n’y est plus : c’est ce qui arrive lorsqu’Arthur est tué par Cobb. 
- Ce qui se passe dans un rêve peut se « sentir » dans le rêve du dessous : les trépidations de l'émeute au niveau -1 provoquent des tremblements de décor au niveau -2. La chute dans la baignoire remplie d’eau est de même suivie d’une brusque arrivée d’eau dans le rêve inférieur. 
- On peut ne pas vouloir sortir d’un rêve : Nash à beau gifler Cobb, il ne se réveille pas. 
- Il y a plusieurs façons de sortir d’un rêve : à la fin du temps imparti par un chronomètre, en se faisant réveiller dans le rêve du dessous, en tombant dans l’eau ou en mourant dans le rêve. 
- Si vous êtes encore plus attentifs, mais je pense qu’il faut pas pousser, vous remarquez que le chronomètre ralentit lorsqu’on s’enfonce dans les rêves.

Mine de rien, ça fait beaucoup de choses à admettre, et le jeu du trouble sur le genre a tendance à distraire le spectateur : c’est un second niveau de lecture qui symbolise l’univers dans lequel nous sommes entrés, multiforme, indiscernable, aux frontières mouvantes.

3) Le retour à la réalité, qui a lieu dans un train, est sacrément dur pour Cobb : il s’est vautré sur toute la ligne, son équipe s’est dispersée, et il doit fuir. En plus il n’aime pas les trains ! Cobb se réfugie dans un hôtel où nous assistons à une conversation téléphonique censée être émouvante avec ses enfants : on apprend qu'ils vivent chez leur grands-parents parce que la mère "nest plus là" et qu'ils lui manquent beaucoup. On atteint juste après le premier pivot du film : Saito le retrouve avant qu’il ne puisse s’enfuir avec son ami Arthur, et lui propose un marché qu’il ne peut pas refuser : pratiquer une inception, en échange de son blanchiment et de son retour auprès de ses enfants.

RÊVES PARTAGES / EXTRACTION / INCEPTION 
L’extraction est le procédé par lequel on cambriole le subconscient d’un « sujet », elle est ici utilisée dans le cadre d’un espionnage industriel. 
Mais Arthur nous expliquera un peu plus tard que cette technologie a été préalablement utilisée par l'armée sous sa forme de base de « rêve partagé », pour permettre des entraînements plus vrais que nature. On devine donc que l’extraction en est une dérive illégale. 
L’inception transcende carrément les frontières de la psychologie et de la morale : il s’agit de planter une idée dans la tête de quelqu’un, et de la faire germer dans l’esprit sans qu’il s’en rende compte. Inceptio signifie « commencer » en latin, contraction de in, dedans, et conception, faire naître. L’inception est beaucoup plus difficile à pratiquer que l’extraction, c’est carrément du travail d’artistes !


Nolan nous parle de subtilité.

La matière du film vous accapare donc tout entier, et les ressorts psychologiques sont censés nous prendre aux tripes, mais je dois dire que de ce côté, c’est moins réussi.

Pour nous faire palper l’imprévisibilité des scènes oniriques, Nolan doit nous faire comprendre que la technologie du rêve reste en proie à la fragilité des êtres qui l’utilisent : Cobb est instable psychologiquement, rongé par l’absence de ses enfants et tiraillé par d’atroces remords. Il a la peur au ventre car des tueurs sont à ses trousses, il est toujours en fuite. Pour ajouter au pathos, Nolan insiste sur la relation du héros avec sa femme, Mal, et ses enfants, qui lui manquent terriblement. Ces deux « relations » sont toutefois grossièrement esquissées : Cobb aime ses enfants parce que se sont ses enfants et il aime sa femme parce qu’elle est sa femme (et qu’elle est belle), c’est-à-dire le sacro-saint fonctionnement de la sacro-sainte famille. On ne peut guère demander mieux dans un film de ce genre dans lequel l’intention première reste de tuer le plus de gens possible et de casser du décor.

Aussi la composante « personnages » se résume-t-elle rapidement à quelques clichés :


COBB, GENTLEMAN CAMBRIOLEUR 
Encore un excellent gendre ! Cobb est le protagoniste de l’histoire, il aime ses enfants, il aime sa femme, il est beau mais fidèle (pas le moindre début d’ombre de romance avec la deuxième et dernière fille du film) et super intelligent. Il se décerne lui-même la palme du « meilleur extracteur », et même deux fois de suite, lorsqu’il ira demander à son père, professeur d’architecture, de lui fournir quelqu’un d’aussi bon que lui. Il porte très bien le costume mais aussi le fusil à lunette.

Par contre, sa femme en prend pour son grade. C’est l’antagoniste absolu du héros puisqu’elle reflète ses propres démons. Une femme comme démon de l’homme, personne ne l’avait jamais fait…

MAL, LA FEMME FATALE  
Déjà, rien que le prénom, bon. 
Arthur aura beau dire que dans la vraie vie « elle était charmante », on n’en sait trop rien finalement, vu qu’on ne la voit que fortement dépressive, carrément suicidaire, folle, ou projetée par Cobb. En tant que « projections , elle fait tout pour saboter les plans de son cher et tendre, car il ne lui fait pas confiance et qu’une projection est par définition hostile. Reflet des remords de Cobb, elle n’a de cesse de vouloir le tirer avec elle dans la mort. 
Aussi Nolan use et abuse de l’image de la femme fatale, grâce à Cotillard : robe fourreau, verres à pied brisés utilisés comme des poignards, pistolet tenu de manière sexy, rouge à lèvre sanguin. Elle commet plusieurs meurtres ou tentatives et se montre jalouse à l’égard d’Ariane (« Comment oses-tu la laisser entrer ? »). 
Quand on comprend que ses attitudes ne sont que le fruit du subconscient de Cobb, on veut comprendre quels remords le tenaillent. La raison en est simple : elle et lui furent les pionniers des rêves en profondeur, ils ont été les premiers à se retrouver piégés dans les limbes, un « espace onirique non construit » où le temps s’écoule tellement lentement qu’ils s’y sont retrouvés pendant 50 ans… Et Mal est devenue folle : elle n’a plus été en mesure de faire la différence entre le réel et le rêve, et même pire : elle a décidé d’oublier. 
Le ressort dramatique repose donc sur une idée extra-originale qui nous fera plaisir : l’instabilité de la psyché féminine. 
Et ça ne s’arrête pas là : non seulement Mal devient folle, mais en plus, elle ne va pas supporter le seul moyen que Cobb trouvera pour la sortir des limbes : lui faire comprendre que son monde est irréel en faisant tourner sa toupie-totem (c’est un objet fait pour s’assurer que l’on est bien dans la réalité) et la convaincre qu’elle rêve, puis en lui demandant de se tuer pour sortir des limbes. Mort et irréalité : ces deux idées resteront indélébiles dans la tête de Mal même après son réveil, quand Cobb, lui, n’aura pas de difficultés à admettre l’un et l’autre. 
Cobb passe l’intégralité du film à s’en vouloir : il n’aurait jamais dû faire ça à sa « propre femme ». Or, il n’y est pas pour grand-chose. Quand il aura fini de s’en vouloir, il passera aux accusations, reprochant à Mal d’avoir abandonné mari et enfants (« Je dois retourner auprès de nos enfants parce que tu les as laissés »). 
On découvre que cette « charmante » personne, dans sa folie, a concocté un plan particulièrement retors pour contraindre Cobb à se suicider avec elle : elle s’arrange pour le faire accuser de son meurtre en se faisant déclarer saine d’esprit (!) par plusieurs psychiatres et en déposant chez son avocat une lettre stipulant qu’elle se sent en danger, et ainsi lui faire retirer la garde de ses enfants s’il n’obtempère pas… le tout le jour de leur anniversaire de mariage, après avoir minutieusement saccagé la chambre d’hôtel. 
Elle est donc dépressive, folle, méchante, cruelle, mauvaise mère, irrationnelle et jalouse.

Le plus étrange des personnages reste Saito (l’aide principale de Cobb), un personnage borderline comme Selfridge dans avatar, il relève d’ailleurs de la même figure – celle du capitaliste – et la même ambiguïté plane sur lui.


SAITO, LE CHINOIS CAPITALISTE CRUEL PUISSANT COMPLICE TOURISTE 
- Il est tout d’abord présenté comme un industriel, à qui Cobb tente de dérober des secrets. Mais il est finaud et retourne l’embrouille. 
- Il est ensuite montré comme cruel et méchant : il a intercepté Nash tandis que l’équipe de Cobb tentait de fuir, l’a visiblement fait passer à tabac jusqu’à ce qu’il les dénonce et propose enfin à Cobb de l’achever lui-même. 
- Finalement, dans la seconde qui suit, il devient magnanime, expliquant qu’il ne fera rien à Nash, mais que les employeurs de Cobb, la « multinationale » Coboll Engineering, s’en chargera à sa place. Là, vous devez comprendre que les employeurs de Cobb, ce sont eux les vrais méchants. 
- C’est une personne extrêmement puissante, qui est susceptible de racheter une conduite à Cobb, le laver de toutes les charges qui pèsent sur lui et lui permettre de rentrer au pays. Plus loin, on comprendra qu’il est en mesure d’acheter la société Boeing. 
- Il est ensuite présenté comme carrément philanthrope, avec cette phrase extraordinaire pour justifier l’inception dans le crâne d’un concurrent : « le monde a besoin que Fisher Morrow change ses plans », car si le Fisher en question ne démantèle pas les entreprises de son père, on court à un atroce monopole énergétique. 
- Il devient un pote, un partenaire, un véritable complice, en fait, et fera partie intégrante de l’affaire. Grièvement blessé dès le début du casse, il faut perpétuellement lui sauver la vie, jusqu’à la fin, où Cobb vient le conjurer de revenir afin qu’ils vieillissent « côte-à-côte ». 
Ce rôle est tenu par Ken Watanabe et le choix d’un personnage chinois n’est pas anodin : Nolan situe son action dans un futur proche, et chacun sait que dans un futur proche, c’est la Chine qui dominera le monde. C’est supposition me parait corroborée par la mention de Mombasa, ville du Kenya, comme « pré carré de Coboll », puisque qu’aujourd’hui, on a l'impression que l’Afrique est devenue à la Chine ce que la Chine fut à l’Europe : une source de main d'oeuvre et de matière première bon marché.

L’approximation de ce personnage n’est pas la seule légèreté de Nolan. Le récit est émaillé de carabistouilles regrettables.

UN PEU DE CARABISTOUILLE 
- Cobb, dans la scène initiale où il cambriole l’esprit de Saito, demande à Mal ce qu’elle fait là : or, il le sait parfaitement. Ce passage est destiné à nous orienter vers un espionnage traditionnel, dans le réel, avec un héros traditionnel aux prises avec une femme fatale également traditionnelle. 
- Cobb met des gants pour sortir son arme et dézinguer les gardes de Saito : précaution douteuse dans un rêve, mais le but est encore de nous ancrer dans une réalité que l’on construit nous-même, à partir des autres films de ce genre que l’on a déjà vus. L’espion DOIT mettre des gants. 
- Quand il demande à Mal de s’asseoir sur un fauteuil et qu’il sort une longue corde, qu’il l’attache au fauteuil juste à côté de sa cheville puis qu’il lui prend le pied, on se pense à deux doigts d’assister à une scène de bondage. 
- La révolte urbaine dans le rêve de Nash : les projections ne se comportent jamais ainsi dans le film, même les plus violentes. Elles sont sensés s’en prendre au rêveur, et pas au décor, et jamais en masse, dans un esprit non-entraîné à se défendre contre une extraction. 

Mais ces instants de carabistouille ne s’impriment pas vraiment dans nos cerveaux, sollicités par la recherche de la solution du puzzle. On est bien accrochés : la Grande Complication promet d’être réussie et les aléas psychologiques de nos héros sont des zones de confort, suites de stéréotypes bourrins sur l’amour et la vie qui ne demandent absolument aucune dépense de matière grise pour être appréhendés.



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