La Belle Hélène

Helen of Troy,
par Evelyn De Morgan

Je veux vous parler d’Hélène. Je vous édulcore donc la page Wikipédia de la belle, ainsi que quelques pages glanées de cide là, et quelques autres.

Nous verrons ainsi qu’on s’emmerdait pas plus avant l’invention de la presse à scandales… l’empilement successif des légendes produisant une fresque saisissante faite de viols, trahisons, meurtres et vengeances.
      

Hélène est l’archétype mythologique de la belle femme, cause de tous les soucis masculins. Elle est souvent décrite comme l'héritière de Pandora...

C’est la fille de Zeus et de Léda. Sa naissance est des plus étonnantes : Léda, épouse du roi de Sparte Tyndare, est visitée par Zeus qui a pris la forme d’un cygne. Elle s’unit ensuite à son mari Tyndare, la même nuit. Aussi pondra-t-elle deux œufs : le premier contient Hélène et Pollux, du second sortent Castor et Clytemnestre (une sulfureuse qui a déjà gagné ses galons ici). J’imagine que c’est là la première explication que l’on a trouvé à l’existence de jumeaux dizygotes.

Hélène est la plus belle femme du monde. Seule Aphrodite la surpasse en la matière. Par conséquent, c’est la femme la plus convoitée de la planète. Ainsi, à l’âge de 12 ans, fut-elle une première fois enlevée et mariée par Thésée, avant d’être secourue par ses deux frères. Brave Castor, brave Pollux. Toutefois, Thésée  a eu le temps de faire un enfant à Hélène : Iphigénie, qui fut confiée à Clytemnestre afin qu’Hélène puisse toujours prétendre être vierge.

Lorsque Hélène est en âge de se marier (je ne parviens pas à trouver l’âge légal du mariage chez les Grecs d’alors, mais je crois qu’aujourd’hui ce serait interdit), l’affaire devient compliquée : tout le monde la veut. Puisqu’elle est belle. En tout, une centaine de prétendants se bousculent, tous plus princes les uns que les autres. Pour éviter que tout ce beau monde se foute sur la gueule pour si peu, Ulysse suggère (en échange d’un coup de pouce pour obtenir Pénélope) une géniale idée à Tyndare : dépecer un cheval et mettre tout le monde dessus. C’est la joke de l’histoire. Ce devait être un très gros cheval. Bref, une fois là-dessus, chacun promit que s’il advenait qu’Hélène fut ravie (c'est-à-dire pas contente : kidnappée, homonymie fâcheuse) par qui que ce fût, ils juraient tous de lui prêter secours.

On voit l’efficacité de la précaution, quand même : « Pour éviter qu’on se batte pour cette femme, on se promet de tous aider son mari. » Bizarre.

C’est finalement Ménélas qui est choisi, la légende se prenant un peu les pieds dans le tapis : on ne sait pas si c’est Hélène qui a choisi le plus beau et le plus bête, ou si c’est son père Tyndare qui a désigné le plus riche et le plus laid. Bref, allez savoir si Ménélas est beau, moche, bête, riche ou spirituel, tout ce qu’on sait, c’est qu’il est soit l’un soit l’autre. Hé.

Peu après, Ménélas montre sur le trône de Sparte, ainsi Hélène devient-elle reine. Elle donne à Tyndare une fille, Hermione, et un fils Nicostrate. Ménélas aura également des enfants  de son esclave Piéris et d’une nymphe qui passe par là.

Les amours de Pâris et Hélène, de David
Mais là, ça se complique : un cent-unième larron entre en scène ! Pâris, un jeune homme à femmes abandonné par sa mère Hécube à sa naissance, car elle se doutait qu’il allait faire que des conneries (à savoir mettre Troie à feu et à sang), ce qui ne l’empêcha pas de les faire, puisqu’il fut recueilli vivant par une famille de bergers. Il se trouve qu’Aphrodite, pour le remercier de l’avoir désignée comme plus belle femme de l’Olympe, lui a promis la plus belle femme mortelle : Hélène. Perso, j’y vois une perfide manœuvre d’Aphrodite pour mettre la misère à la seule humaine qui lui arrive à la cheville, mais bon, ça n’est que mon avis. C’est bien des salopes, toutes ces belles filles. 

Bref, Pâris, se rend rapidement à Sparte pour retirer son lot.

La légende est encore confuse sur la désertion d’Hélène de son foyer, les poètes et mythographes s’entredéchirant pour décider de la culpabilité ou non de la belle poire : Aphrodite y met-elle son grain de sel pour aider Pâris à convaincre Hélène de le suivre ? La belle le décide-t-elle de son plein gré ? Ou bien Pâris l’enlève-t-il purement et simplement ? Toujours est-il qu’il la prend pour épouse à Troie, et lui fait quatre enfants, trois fils, et une fille également nommée Hélène.

Notons qu’une partie de la légende affirme… qu’Hélène n’est jamais arrivée à Troie. Lors de son voyage avec Pâris pour s’y rendre, le roi Protée d’Egypte, choqué par les agissements de Pâris, aurait gardé auprès de lui Hélène. Grâce à ses dons magiques, le roi aurait conçu un fantôme, une ombre, qui aurait par la suite suivi Pâris.


Je vous prie de croire que Ménélas se fâche tout rouge : il appelle à l'aide son frère Agamemnon, bat le rappel des dizaines de prétendants qui ont prêté serment sur la peau de cheval, et engage la plus grosse et la plus meurtrière des guerres antiques, Sparte contre Troie, le retour de la vengeance. Elle va durer 10 ans.


L’attitude d’Hélène pendant le conflit est des plus ambiguës. Ainsi, elle aurait imité les voix des épouses des princes Grecs cachés dans le cheval de Troie, pour les faire sortir malgré eux, et favoriser les Troyens. Mais, le jour de la chute de Troie, c’est elle qui montera sur les remparts de la ville pour agiter un flambeau afin de prévenir les Grecs qu’ils pouvaient investir la ville.

Hélène à la porte de Scée, Gustave Moreau

Ceux qui la défendent affirment qu’en réalité, Hélène n’était qu’un prétexte pour les hommes, et un jouet pour les dieux, Héra et Athéna, derrière les Grecs de Ménélas, continuant de batailler contre Aphrodite, derrière les Troyens, pour lui faire payer ses comportements éhontés.

Après bien des bataillements dont je vais vous faire grâce, Pâris est blessé d’une flèche par Philoctète. Il parvient toutefois à fuir le champ de bataille, et retourne chez sa première épouse, la priant de le soigner. Celle-ci refuse, il meurt.

Pour autant, Hélène ne revient pas au bras de Ménélas, elle épouse en quatrième noce (mais on lui compte un cinquième mari : Achille, héros grec, qui brûlait de la « connaître » et en eut paraît-il l’occasion avant la guerre, lorsqu'il fut envoyé à Troie pour demander - en vain - la restitution d'Hélène à son légitime propriétaire) Déiphobe, un autre prince Troyen.

Hélène de Troie, Dante Gabriel Rossetti
Toutefois, Troie finit par tomber, la ville est réduite en cendres, Ménélas assassine Déiphobe et compte en faire autant avec sa catin de femme quand il lui met la main dessus.

Mais non. Elle est trop belle Hélène, et Ménélas retombe amoureux d’elle. Il la ramène à Sparte, le voyage durant… 8 ans, parce que Ménélas n’avait pas convenablement sacrifié aux dieux après la victoire, ce qui lui cause tout un tas de soucis.

Le couple, arrivé à bon port, vit enfin heureux, à Sparte.

A la mort de Ménélas, Hélène est toutefois chassée de la ville par ses beaux-fils. Elle se réfugie à Rhodes : bien mal lui en prit, puisque la reine Polyxo lui reproche la mort de son mari devant les portes de Troie, la fait étouffer dans son bain et suspend son corps à un arbre.

La tradition la plus courante veut qu’Hélène, après sa mort, ne fut pas précipitée aux Enfers, en vertu de sa naissance divine. Elle coulerait une joyeuse éternité sur l’île Blanche… au bras de son dernier amant, Achille… le seul prince grec qui n’avait pas demandé sa main, lors du serment de Tyndare.



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