Jeanne d'Arc (1) : ça commence mal...


Joan of Arc - Jules Bastien-Lepage (1879)
Nous la connaissons tous un peu. C’est la fille (elle avait dix-sept ans, dix-neuf quand elle monta sur le bûcher) qui a bouté l’Anglois hors de France. On le sait parce qu’on l’apprend à l’école, et parce que, depuis la Révolution, elle est un support de la propagande républicaine, grâce à ses caractères de pureté et de résistance pugnace.

Jeanne naît de Jacques d’Arc et d’Isabelle Romée le 6 janvier 1412, à Domrémy, entre Champagne et Lorraine. C’est une petite fille travailleuse sur la ferme de son père, et très pieuse. Si vous observez la carte ci-dessus et que vous y cherchez Domrémy, vous comprendrez que chez elle, la situation politique est très compliquée. La petite Jeanne est une enfant intelligente et réfléchie, et les malheurs de son pays la touche profondément.

La France en 1453

La France, en pleine Guerre de Cent Ans, va mal : son roi (Charles VI) est fou, et sa femme Isabeau de Bavière le trompe, ce qui jette le doute de l’illégitimité sur son dernier fils survivant (Charles), sensé reprendre le trône. Et ça n’est pas tout ! Depuis 70 ans les Capétiens et les Plantagenêt se tapent dessus , et après eux les Armagnacs (favorables au royaume de France) et les Bourguignons (qui soutiennent les Anglais) s’écharpent depuis le meurtre de Louis d’Orléans (amant de la dame suscitée et donc père supposé du rejeton évoqué). Et ça n’est pas tout ! La scission a gagné l’Église, et depuis 1378 elle a deux papes, l’un à Rome, soutenu par les Anglais, et l’autre en Avignon. La crise est dure et la vie est grave.

Car en 1415, le roi anglais Henry V profite de cette confusion pour débarquer sur les côtes normandes (défaite d’Azincourt, après la perte d’Harfleur). Le Dauphin Charles, toujours sous la coupe de sa mère Isabeau, doit se réconcilier avec les Bourguignons pour repousser l’ennemi. C’est alors à Jean sans Peur qu'il a affaire, celui qui a jeté les Armagnacs contre les Bourguignons en commanditant le meurtre de Louis d’Orléans. Vous imaginez le peu de réussite de l’opération, Jean sans Peur se fait d’ailleurs à son tour assassiner en 1419. C’est ainsi très logiquement que le fils de Jean sans Peur, Phillipe le Bon, se rallie aux anglais, et que le Dauphin n’est pas plus avancé.

Pour relancer les dés, Isabeau de Bavière choisit de marier sa dernière fille, Catherine de Vallois à Henry V en 1420, avec en dot la Normandie et l’Aquitaine, la couronne devant revenir à leurs enfants à la mort de Charles VI. Ainsi Isabeau écarte-t-elle son fils, le Dauphin Charles.

Charles VI trépasse en 1422, Henry VI, l’enfant de Catherine et Henry V mort quelques mois plus tôt, « revendique » (on revendique pour lui, il n’a que quelques mois) le royaume, qui lui est contesté par la noblesse française. Elle veut croire en son Dauphin. De fait, c’est le frère d’Henry V, le duc de Bedford, qui va assurer la régence. Il va étendre l’influence anglaise vers le Sud jusqu’à la Loire, pendant que le duc de Bourgogne Philippe le Bon fait de même vers le Nord. Le Dauphin ne contrôle plus que le centre de la France.
Les Anglais décident d’en finir en 1428 en envahissant Orléans, le siège du Dauphin.

Le petit bout de France de Jeanne, pendant ce temps, passe de mains en mains.

Sainte Marguerite d'Antioche
(Giulio Romano - 1518)
Sainte Catherine d'Alexandrie
(Caravaggio - 1598)

Jeanne a sans aucun doute entendu parler du Dauphin et des ses aléas royaux, car, à 13 ans, elle affirme entendre les voix des saintes  Catherine et Marguerite, ainsi que de l’Archange Michel, lui demandant d’être pieuse et vaillante pour libérer le royaume de France et  rétablir le Dauphin sur le trône.



Plus la guerre s’annonce aux portes de son village, plus ces voix se font entendre.



Jeanne d'Arc ayant la vision de l'archange saint Michel d’Eugène Thirion (1876)

Elle finit par en parler à un « oncle », en fait un cousin, qui la mène à Vaucouleurs en 1428, une forteresse toute proche. Le cousin, Laxart, pense ainsi lui ouvrir les portes jusqu’au Dauphin, pour que Jeanne soit écoutée, mais là, Baudricourt, le seigneur local, lui conseille de gifler la gamine et de la ramener chez ses parents. Il était pourtant clair pour Laxart et tout un tas de ses patriotes, cela fut élevé au rang de « prophétie », que plongée dans le chaos par l’indigne Isabeau, la France se verrait sauvée par une Vierge. Qu’elle vint de Lorraine, haut lieu des hostilités, en ajoute au tableau. Jeanne rentre chez elle, mais elle finira par trouver preneur.


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