Mon permis de conduire


Ma première tentative de passage du permis de conduire (la mauvaise, donc), le 21 août 2006.

C’est peut-être le diplôme, ou plutôt examen, que le plus de personnes au monde ont passé et réussi.

Mais moi, ça me dépasse. J’en conclus que je suis vraiment… ben dépassée, tiens, par tout le monde. « Elle courait dans le mauvais temps, tous devant tous devant… »… Non, j’ai eu de la chance, il ne pleuvait pas. J’ai quand même eu du mal, je vous rassure !


Pourtant, j’avais fait un beau (parait-il) baptême de la roue, la veille, en pleine nuit, par les routes et les chemins de ma petite campagne vallonnée, tortueuse mais surtout défoncée et très étroite du point de vue de ces voies de communications que l’on appelle vulgairement « routes ».

J’avais calé qu’une fois et encore, seulement parce que j’avais négligemment omis d’enlever le frein à main. Ensuite, rien de plus grave que de rouler à 20 ou d’éblouir à coup de pleins phares un usager arrivant en sens inverse…

Mais aujourd’hui, non seulement j’ai une nouvelle fois négligemment omis d’enlever le frein à main, mais en sus, cette boulette rectifiée, je n’ai pas plus réussi à faire tourner ce foutu moteur. Bref, l’instructeur a renoncé, j’étais contente. J’ai quand même retenu tout ce qui tombait de sa bouche, et je lui ai même servi de jolies trajectoires. Je lui ai dit que j’étais mauvaise en orientation, il m’a répondu qu’il était facultatif de le signaler, les femmes, vous savez…

Il a été au moins aussi gentil qu’il était beau, de vrai ! Des yeux patients, des cheveux compréhensifs, des mains pédagogues… tout ça quoi. On a bien rigolé quand on a commencé à causer mécanique. C’est très drôle la mécanique. A hurler de rire. Bref. C’est pas en mécanique que j’ai gagné des points. Ni en « émotivité », comme ils disent. Oui, je l’avoue, voir autant de gens innocents qui entourent une fille aussi ahurie, anachronisée, nouille que moi et qui se déplace dans un truc aussi gros qu’une voiture, ça me fait tout particulièrement peur. Je me suis quand même bien amusée, je veux dire, le stress permanent mis à part. Un peu grisant. C’est lui qui tenait la pédale d’accélérateur. Ça a de bonnes réactions, un instructeur, il nous a évité deux trottoirs.

En fait, c’était « pas catastrophique », voilà, ce que pourtant j’étais sûre que ça allait être. Mais pas exactement brillant non plus. Pour vous dire, même à l’examen de la vue, c’était pas terrible.



Deuxième tentative (la bonne), deuxième post, daté du... 27 novembre 2007. Je vous laisse imaginer les dizaines d'heures qui ont séparer les deux tentatives. Peut mieux faire (j'ai une circonstance atténuante : je suis enceinte jusqu'aux yeux).


Mon permis de conduire, c’est un peu le fil rouge de mes dernières années.

Sans rire, ma toute première inscription dans une auto-école remonte à 2004. Depuis, j’ai fait 4 établissements, plus de 100 heures de conduite, 3 essais pratiques et ça m’ (nous) a coûté 3000 euros au bas mot, très bas mot, ça fait longtemps que je ne compte plus...

Le 26 novembre, je repasse sur le grill.

J’ai commencé par nous perdre pour aller au centre d’examen, mon mari, éreinté par des heures et des jours de trajet à me traîner, fulmine effroyablement. Quand on finit par trouver le lieu de départ de l'examen, une heure avant mon passage, je suis au bord des larmes.

Les dernières heures de conduite ont été des catastrophes, mon nouveau ventre a bouleversé tous mes réglages de siège et rétros, déjà laborieux vu mon format, et j’ai l’impression de conduire comme au premier jour, aussi bien qu’une savate sourde et aveugle.

Le monsieur à côté de moi, est avenant comme une tempête de neige qui pointe à l’horizon, ma monitrice, derrière lui, a pris une feuille qu’elle a titré de mon prénom et attend, stylo à la main, que je faute.

Il pleut, il est 10 heures.

Installation. Je pense même à mettre en route les essuie-glace, accessoires dont je me passe incroyablement bien d’habitude, tant je suis concentrée sur ce qui se passe de l’autre côté de mon pare-brise.

C’est parti, vous prendrez à droite en sortant, puis encore à droite sur le giratoire. Oui chef. Les vitesses passent en douceur, je surveille le compteur, le frein à main est dûment abaissé.

Le rond-point de la mort (qui n'est pas un rond-point parce qu'il fonctionne avec des feux rouges, et là, moi, je suis dépassée, encore, toujours) : les doigts dans le nez. Un peu moins le suivant : vous contrôlerez à la sortie des giratoires. Oui chef. Oups, c’était pas une prio à droite ça ? J’ai dû pas passer trop vite, il dit juste : vous anticiperez davantage à l’approche des intersections. Oui chef. Insertion sur la rocade : même pas mal, même si je me demande longuement si les distances de sécurité sont bonnes ou s’il vaut mieux doubler la caisse qui me précède. La pluie redouble, je reste tranquille où je suis. Vous allumerez vos feux de croisement. Oui chef. Rangement en bataille un peu laborieux, mais je m’en sors bien, en sécurité, roues droites. Vous mettrez les feux de croisement et indiquerez le voyant correspondant au tableau de bord. Oui chef. Ils sont déjà allumés. Mais point de voyant, c’est la première fois que je m’en rends compte, il se fout doucement de ma gueule. Vous me montrerez le conteneur à liquide de nettoyage du pare-brise. Oui chef. La manette du capot est comme de bien entendu loin sous mon ventre. Un peu de gymnastique et c’est bon. Facile, c’est le bouchon bleu, y a un dessin dessus en plus... Redépart, frein à main de nouveau dans la position qui doit être la sienne. Vous me ferez un arrêt de précision au niveau de ce lampadaire. Oui chef. Facile. Oups : vous penserez à prévenir plus tôt de votre intention de ralentir. Oui chef. Là, quand même, je me dis merde, tu viens tout juste de rerater ton permis. Et pourtant, pourtant... je n’ai croisé aucune ligne blanche, j’ai dépassé aucune vitesse réglementaire, j’ai mis tous les clignos qu’il fallait et peut-être même plus, j’ai jamais oublié l’angle mort, et nous, on est tous vivants, alors merde, quoi, vous me le donnez ce permis ?

Arrêt au parking. Je sors verte, jaune, bleue. Il pleut toujours, j’ai les glandes. Marre de ce monde pourri à la con qui pue...

Le lendemain, dans le courrier du matin, la lettre que j’attends depuis d’interminables heures. Elle est légère : ça veut dire que cette fois, mon dossier ne m’est pas retourné... Et dans la case en haut à gauche, une main compatissante à rayer la mention inutile : insuffisant. Et en vert, encadré : FAVORABLE. Bordel de dieu, je viens d’avoir mon permis. Je ne suis plus piétonne, avis à ceux qui traînent sur la route... : désormais, il faudra compter avec moi, je peux surgir, n’importe où, n’importe quand...

Sans compter que je souhaite ici, devant vous, consacrer l’année 2007 Grand Millésime. Joyeuse fin d’an à tous...

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